Pour lancer son nouveau prix du design, L’Œil vous présente une sélection de 15 objets choisis parmi les dernières œuvres des designers internationaux et de la production industrielle de l’année. Un jury de spécialistes se réunira en septembre pour élire les meilleures créations et récompenser les designers lors du Smart, le Salon du Mobilier et des Arts décoratifs, qui se déroulera du 28 septembre au 2 octobre
au Carrousel du Louvre.
Le grand air de Marc Berthier
Designer, Marc Berthier a créé des centaines de produits partagés par le plus grand nombre. Pédagogue, il a formé des générations de créateurs, parmi lesquels les Tsé & Tsé et les RADI, Jean-Marie Massaud et Matali Crasset, Patrick Jouin et Bruno Bellamich. Bref, un véritable Who’s who du design français. Il œuvre depuis 10 ans pour la firme Lexon, au rythme de 80 produits par an, du stylo à la calculatrice, du vêtement de sport à la radio. Cette année, toujours sous les couleurs de Lexon, il joue le grand air de la fraîcheur avec Tykhofan, un ventilateur souple en élastomère.
La rigueur souple de Maarten Van Severen
Double casquette pour le plus en vue des designers belges, Maarten Van Severen
(L’Œil n°524). D’abord, celle d’un artisan concevant des meubles exclusifs en auto-production. Ensuite, celle d’un designer industriel qui met au service des meilleurs éditeurs européens de meubles sa science et sa maîtrise des techniques et des matériaux. D’un registre à l’autre, l’« écriture » de Van Severen se déploie dans l’espace avec rigueur, élégance et tension. Démonstration de cette maîtrise est à nouveau faite avec la MVS Chair qu’il vient de créer pour Vitra. Une sculpture en forme de chaise longue et dont la netteté du dessin ne retire rien au confort et à la souplesse.
La propreté selon James Dyson
Designer, chercheur ou inventeur, allez savoir... Quoi qu’il en soit, James Dyson s’attache à mélanger les genres. Successivement, il invente et dessine le Sea Truck, une barge étonnante ; la Ballbarrow, une brouette tout terrain qui passe là où les autres ne vont pas ; le Wheelboat, un curieux bateau à roues à l’aise dans l’eau et sur terre... Et puis, ce qui le fera connaître du monde entier, le fameux Dual Cyclone, l’aspirateur sans sac. Voici aujourd’hui la Contrarotator, une machine à laver le linge révolutionnaire, équipée de deux tambours tournant simultanément en direction opposée. Cet OVNI, digne du cube mystérieux de 2001, l’odyssée de l’espace, existe en trois couleurs : bleu, violet et argent.
L’alphabet de François Bauchet
Brouilleur de pistes, Arty-designer, archi-designer, techno-designer... On ne sait où caser François Bauchet (L’Œil n° 490). Et il s’en amuse, lui qui sans cesse s’attache à la théâtralisation, à la scénographie, à la mise en perspective de chacune de ses créations qui découlent toujours d’une stratégie : parfois, la plasticité prime ; d’autre fois, c’est la structure ou l’inscription dans l’espace. Avec sa dernière invention, Bauchet mélange le tout de très intelligente manière. Deux éléments, extrêmement simples, en forme de lettres, un « L » et un « T ».
Et avec ces deux lettres en résine tendue, d’un gris sourd « plombeux », il compose un vocabulaire fait d’étagères, de consoles, de tables, de banquettes...
Les grands espaces d’Apple
Apple piétinait et Steve Jobs, le fondateur, revint. Résultat, il y a cinq ans déjà, l’apparition des I Mac et I Book, qui introduisaient le formalisme et la couleur dans le monde sévère et grisâtre des ordinateurs. Et voici le tout nouveau Power Book G4 Titanium qui revient au gris. Outre une technique époustouflante puisqu’il intègre un processeur Power PC G4 avec Velocity engineTM cadencé jusqu’à 500 MHz, un lecteur DVD à chargement frontal, une autonomie de cinq heures... le G4 Titanium dispose d’un écran panoramique de 15,2 pouces de diagonale et ne pèse que 2,4 kg. Une image éclaboussante, une légèreté incroyable et pour couronner le tout, une esthétique parfaite d’élégance.
Le printemps des Bouroullec
On parle de plus en plus des frères Bouroullec, déjà couverts de prix et récompenses malgré leur jeune âge (L’Œil n° 509). Ronan, 29 ans, et Erwan, 25 ans, démontrent une maturité exceptionnelle. Huit vases qui s’articulent en plusieurs milliers de combinaisons, un lit-clos (ils ne sont pas Quimpérois pour rien) qui devient une chambre à coucher. Tout chez eux est à la fois limpide
et mystérieux. Les voilà qui abordent aux rivages du meuble via cette chauffeuse en acier, mousse et tissu, équipée d’un appui-tête et d’un repose-pied sur option. Une chauffeuse nommée Spring et qui fait le printemps de Capellini, le grand éditeur italien.
Les ivresses de Serge Lutens
Arabie, Sa Majesté la Rose, A la nuit, Douce amère, Ambre Sultan, Serge Lutens (L’Œil n° 501), qui règne depuis 20 ans sur l’empire parfumé de Shiseido, crée ses propres parfums, cinq merveilles aux noms évocateurs. Pour celui qui pense que « le beau a besoin du rare », il est évident que l’ivresse et le flacon vont de pair, ne font qu’un, se fondent l’un en l’autre. Le flacon est une sorte de Tanagra aux proportions d’une justesse incroyable. Et chaque boîtier des cinq parfums s’habille d’enluminures mauresques aux subtiles nuances. Une simplicité apparente et une complexité évidente se conjuguent ici en une perfection d’équilibre et d’élégance.
Le retour aux sources de Chrysler
Retour aux années 30 et 40 aux Etats-Unis
où naît à cette époque-là le premier style authentiquement américain, le Streamline. Celui des coffee-shops et des stations-service, des diners et des blanchisseries, des cinémas de province et des « belles américaines »... Un style à trois vagues, celles du fil du courant, qui figure l’image de la machine, la fascination de la vitesse, l’essor de l’automobile, et dont Raymond Loewy, avec ses locomotives pour la Penn Central Transportation Company, fut l’une des figures majeures. Depuis quelques mois, on voit de plus en plus dans les rues de Paris et d’ailleurs une voiture à la drôle de frimousse et un air de déjà vu : le PT Cruiser de Chrysler, hommage aux années Streamline, d’une modernité et d’un confort absolus.
La vague de Marc Newson
On le sait surfeur émérite, sautant d’un avion l’autre à la poursuite de la vague idéale (L’Œil n° 515). Ce qui ne l’empêche pas d’être l’un des designers les plus prolifiques de sa génération. Objets pour Alessi, montres pour Ikepod, sièges pour Vitra, jet pour Dassault, voiture pour Ford, torche pour la flamme des Jeux Olympiques de Sydney, sa patrie... et nombre d’architectures intérieures. Et toujours ses formes organiques, fluides et mouvantes qui évoquent irrésistiblement la vague. Dernier-né de cette longue « histoire d’eau », le nouveau broc Ricard aux courbes évasées, au jaune lumineux et à la peau lisse et tendre.
Les yeux d’Andrée Putman
Premier prix d’harmonie du Conservatoire national supérieur de musique de Paris, Andrée Putman possède « l’oreille absolue » (L’Œil n° 500), qu’elle a enrichie depuis d’un « œil absolu ». De ce regard net, précis, juste, elle a fait son métier. Designer, éditeur, architecte d’intérieur, elle a redonné au noir et au blanc leur légitimité de couleurs à part entière. Un noir et un blanc qui, pour elle, ne s’opposent pas, mais se confrontent souvent, s’affrontent parfois, se complètent toujours. Pour L’Amy, elle vient de créer ses toutes premières lunettes solaires, inspirées tout autant des très populaires lunettes destinées à l’éclipse que du mystérieux loup du carnaval de Venise.
La lit-berté des RADI designers
Ils sont quatre, Florence Doléac, Laurent Massaloux, Olivier Sidet et Robert Stadler (L’Œil n°519). Quatre à créer de concert des objets industriels ou, selon l’humeur, des manifestes à vocation unique. Souvent considérés comme des marginaux, ils n’en occupent pas moins le terrain avec constance. Parfois, ils créent en solitaires et deviennent, selon leur propre terminologie, des RADI « libres ». Florence Doléac et Robert Stadler partagent, la nuit et en toute légalité, le même lit. Ce qui ne les empêche nullement de songer au jour. Résultat, ils cosignent ce lit de jour, nommé Sigmund, aux couleurs éclatantes, à la structure d’acier matelassée de mousse et à la peau de laine.
La magnificence de Garouste et Bonetti
Dans le jeu des sept familles du design français, Elisabeth Garouste et Mattia Bonetti occupent une place spécifique (L’Œil n°517). Celle, sans doute, de la mère et du père de la famille des continuateurs de la grande tradition française des arts décoratifs. Des salons de Christian Lacroix au tramway de Montpellier en passant par la chaise Barbare, ils privilégient l’expression,
le raffinement, la présence. En témoigne, une fois encore, cette armoire-cabinet, nommée Olaf, en bois laqué brun, tendue de feuilles d’or et d’aluminium, dont les deux portes découvrent un précieux aménagement en chêne.
Le plug and play de Visor Edge
Voici venu le temps du plus mince et du plus extensible des ordinateurs de poche, le Visor Edge, de Handspring. Basé sur Palm O5, il possède naturellement carnet d’adresses, bloc notes, agenda deuxième génération, calculatrice sophistiquée, citytime... Il est en outre doté de nouvelles fonctionnalités comme la recherche rapide, les alarmes silencieuses, la synchronisation sans fil, la duplication, ainsi que d’une sécurité accrue et d’une navigation améliorée. Bref, un ordinateur plus que performant, sans pile puisque rechargeable avec une autonomie d’une semaine. Mieux, il multiplie les extensions par le simple jeu du plug and play : un simple module à charger et le Visor Edge devient caméra, téléphone, lecteur MP3, appareil photo numérique...
Le panier pliable des Tsé & Tsé
Tsé & Tsé, soit Catherine Lévy et Sigolène Prébois, à peine 70 ans à elles deux, déjà 15 ans de pratique et une notoriété qui ne cesse de croître. Deux têtes et quatre mains qui élaborent un univers fait de ponctuations légères comme un semis de notes sur une partition, de notations infimes comme des impressions et des esquisses au fil des pages d’un carnet de voyage, de sensations fugaces qui prennent la forme de lampes en guirlande, de vaisselles asymétriques, de bijoux fonctionnels... Dernier-né de l’imagination des Tsé & Tsé, le Pique-nique d’Amérique, un panier pliable où se mêlent métal, tissu et couleurs, léger, délicat, ténu et aux usages multiples.
Les facéties de Philippe Starck
Le plus célèbre des designers est devenu une sorte de « héros populaire » (L’Œil n°488). Philippe Starck joue de plus en plus à s’amuser, pour le plus grand plaisir de ses fidèles, utilisateurs ou éditeurs. Parmi ces derniers, l’Italien Kartell avec lequel Starck a déjà réalisé, l’an dernier, La Marie, un manifeste plein d’humour en forme d’archétype de chaise. Le voici qui récidive avec Boem (prononcer Bohème), un tabouret en forme de vase qui n’est autre, une fois encore, qu’un jeu dialectique et formel sur l’aspect « faux cristal » du polycarbonate. En jaune, rouge, or, violet ou vert bouteille, Boem, pour peu qu’on le multiplie, compose des bouquets de couleurs du plus bel effet.
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L’Œil du design 2001
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°528 du 1 juillet 2001, avec le titre suivant : L’Œil du design 2001