Le Musée des arts décoratifs de Paris invite à voyager du XVIIIe siècle à nos jours, entre jeux de lumières et trompe-l’œil.

De son œuvre, le musée conserve un fonds unique au monde, riche de près de 500 dessins issus de son atelier, qui vient d’être restauré. Sa figure est ainsi le point de départ d’une exposition inédite sur ce courant dont l’esthétique exubérante, qui apparaîtrait presque comme un défi au bon goût tant elle se révèle audacieuse, continue de nourrir les créateurs contemporains, à l’instar de Tan Giudicelli dans la mode ou de la plasticienne Cindy Sherman.
De la vie de Nicolas Pineau, on sait qu’il se forma à Lyon avant de s’installer aux Gobelins à Paris. Il n’est pas encore maître sculpteur lui-même qu’il publie déjà ses premiers recueils d’estampes chez l’éditeur Jean Mariette, et que ses réalisations fort sages révèlent déjà un talent certain, dont témoignent par exemple des bordures d’encadrement aux armes du roi dessinées à la sanguine. En 1716, le voici appelé par le tsar Pierre le Grand, dont il devient premier sculpteur. À Saint Pétersbourg, il réalise des projets décoratifs, forme des artisans, dessine des fontaines représentant la victoire d’Apollon ou grandioses cascades, et statues équestres, dont les projets étonnants sont présentés dans l’exposition. À son retour en France, en 1728, une nouvelle esthétique a vu le jour : l’art rocaille, prisé par une aristocratie qui entend vivre loin de la pompe versaillaise après le long déclin de Louis XIV.

Un style dont l’influence se fait encore sentir
Une centaine de dessins, accompagnés de quelques boiseries sculptées conservées ou de maquettes, témoignent de l’audace et de la nervosité avec laquelle ce sculpteur sur bois, d’autant plus libre qu’il ne travaille pas pour le roi, s’empare de cette esthétique nouvelle, marquée par les contrastes visuels, qu’il pousse à leur paroxysme, les jeux d’ombre, de lumière, les faux semblants, l’asymétrie. Par exemple, le dessin virtuose d’un angle de cadre, où un sanglier semble surgir du décor : jouant avec les lignes courbes, les ombres et les effets de lumière, le dessin impose au bois les formes les plus exubérantes à la matière, qui épouse les caprices de l’artiste.
Pédagogique, l’exposition présente une vidéo où le sculpteur François Gilles donne à voir la technique par laquelle le bois se plie aux exigences du sculpteur pour prendre la lumière, avant de présenter la variété des formes de ce rococo, qui enflamme au cours du XVIIIe siècle l’ensemble des arts décoratifs en Europe, faisant ressembler les meubles, les porcelaines ou les luminaires à des créatures fantastiques, jouant avec des motifs animaliers ou orientaux.
« Kitsch » ? Peut-être, et alors ? Le terme se popularise au XXe siècle et se déploie jusqu’à nos jours, alors qu’artistes et designers revisitent et parodient ce rococo qui, avant eux, a déjà inspiré l’Art nouveau. Ce parcours à la scénographie sobre et élégante s’achève ainsi avec un porte-manteau qui semble avoir perdu toute conscience de sa fonction pour (re)devenir arbre ou vigne folle signé par Mathieu Lehanneur, une robe rêvant de devenir commode imaginée par Tan Giudicelli ou une soupière de la manufacture de Sèvres dans laquelle Cindy Sherman a inséré son portrait, pour faire pâlir d’envie le fantôme de Madame de Pompadour. Quelle irrévérence !

« Rococo & Co, de Nicolas Pineau à Cindy Sherman »
Jusqu’au 18 mai 2025 au Musée des arts décoratifs
www.madparis.fr
Publi-information diffusée en partenariat avec le Musée des arts décoratifs de Paris.