LE CAIRE (ÉGYPTE) [19.12.12] – Les récents examens menés sur la momie de Ramsès III ont confirmé que le pharaon fut bien assassiné lors de la « conspiration du harem », une tentative de coup d’Etat menée par une concubine de Ramsès III dont on connaît l’existence grâce au célèbre « papyrus judiciaire » de Turin.
Bien des égyptologues se sont penchés sur le « papyrus judiciaire » de Turin depuis la fin du XIXe siècle, dans l’espoir d’y découvrir des indices éclairant les circonstances étranges de la mort du pharaon Ramsès III.
Il faut dire que l’histoire que raconte ce compte-rendu de procès antique est digne d’une intrigue de roman. Bien qu’incomplet, le papyrus évoque en effet un complot ourdi à la fin du règne de Ramsès III et visant à assassiner le pharaon. La « conspiration du harem » aurait été menée depuis le gynécée royal par la reine Tiyi, une des concubines de Ramsès III, qui, à l’approche de la mort du pharaon, aurait voulu amener sur le trône son fils Pentaour. Le jeune homme, bien que de sang royal n’était pas pressenti pour la succession puisqu’il était un des plus jeunes fils de Ramsès III. D’après le papyrus de Turin, de nombreux dignitaires issus de l’armée et même du clergé furent impliqués dans cette tentative de coup d’Etat.
Si les circonstances précises du complot demeurent un mystère, on sait en revanche qu’une tentative d’assassinat fut déjouée en 1156 av. J.C., et que plusieurs personnes impliquées furent arrêtées et condamnées à mort. Les noms des conspirateurs furent effacés des monuments où ils étaient gravés, et l’on a pu constater que la signification de leurs noms a été inversée dans le « papyrus du procès », une véritable marque d’infamie dans l’Égypte antique. Du sort de Tiyi on ne sait rien, et il est possible que son titre de reine lui ait évité la peine capitale. Le jeune Pentaour n’eut pas la même chance, puisqu’il fut condamné au « suicide par empoisonnement ».
Malgré cette profusion de détails, les textes antiques restent flous sur le sort de Ramsès III. Fut-il seulement blessé lors de cette tentative de meurtre, y échappa-t-il ? Une partie du texte du papyrus de Turin est généralement considérée par les spécialistes comme une déclaration directe du pharaon appelant les jurés en charge du procès à faire preuve de sévérité. Il était cependant difficile de savoir si le pharaon en question était bien Ramsès III ayant survécu à son assassinat, ou s’il s’agissait de son successeur Ramsès IV (fils présumé), punissant la mort de son père.
Si des examens radiographiques furent menés dans les années 1960 sur la momie redécouverte de Ramsès III, aucune trace n’avait mis en évidence des blessures suspectes. Les techniques modernes ont cependant fourni de meilleurs résultats. En collaboration avec Zahi Hawass et différents organismes de recherche égyptiens, le spécialiste allemand Albert Zink (célébré pour ses recherches sur l’homme des glaces Otzi s’est penché sur le cas Ramsès III. Cette fois, l’autopsie numérique a révélé une blessure d’environ 70 cm juste en dessous du larynx de la momie. Selon les chercheurs, « L’étendue et la profondeur de la plaie indique qu’elle a provoqué la mort immédiate de Ramsès III ».
Suite à cette découverte, l’hypothèse d’une blessure post-mortem a été avancée. La plaie aurait pu être pratiquée par les maîtres embaumeurs lors de la préparation du corps. On a cependant jamais constaté ce type d’intervention sur les momies retrouvées jusqu’à ce jour. De plus, une preuve finale de l’assassinat a été découverte à l’intérieur de la blessure rapporte le British Medical Journal. Les chercheurs y ont découvert une amulette de pierre, « l’œil d’Horus », réputée dans l’Égypte antique pour ses pouvoirs de guérison et placée dans la gorge du cadavre par les embaumeurs. « La gorge tranchée et l’amulette prouvent clairement que le pharaon a bien été assassiné » a déclaré Albert Zink.
Les chercheurs pourraient également être en voie de clarifier un autre mystère tournant autour de Ramsès III. Quant la tombe du pharaon égorgé fut identifiée au XIXe siècle, on découvrit un autre corps, celui d’un jeune homme, enterré aux côtés du pharaon. Cette seconde momie avait immédiatement suscité l’intérêt, car le corps n’était pas enveloppé comme à l’accoutumée avec des bandelettes, mais avec des peaux de chèvre, un procédé « rituellement impur » empêchant le défunt de gagner l’au-delà. Au vu des similitudes repérées lors des comparaisons ADN pratiquées sur le corps de l’inconnu et celui de Ramsès III, les chercheurs pensent que l’inconnu « maudit » pourrait-être Pentaour, puni pour l’éternité après avoir participé à un parricide.
Cependant, seule une confrontation ADN avec la momie de la reine Tiyi permettrait de prouver définitivement cette hypothèse. Il faudra donc patienter, car le corps de la reine dort toujours quelque part sous les sables…
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Les conspirateurs du harem ont bien assassiné Ramsès III
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Abonnez-vous dès 1 €Statue colossale de Ramsès III, Karnak, Egypte - © Photo Landry Minoza - 2009 - Licence CC BY-SA 2.0