WASHINGTON (ETATS-UNIS) [16.07.15] – Le Smithsonian National Museum of African Art est au cœur des critiques pour une exposition financée par le comédien Bill Cosby, accusé de viol par une trentaine de femmes, et montrant une partie de sa collection.
Au cours des derniers mois, le Smithsonian a été vivement critiqué pour ne pas avoir réagi aux allégations de viol portées à l’encontre de Bill Cosby. En effet, la collection privée du comédien représente un tiers des œuvres présentées au National Museum of African Art dans l’exposition organisée pour son 50e anniversaire, « Conversations: African and African American Artworks in Dialogue » dont l'ouverture le 9 novembre 2014 a coïncidé avec le déchainement médiatique autour de Bill Cosby. Beaucoup reprochent au musée d’avoir ignoré la situation et d’avoir refusé de communiquer sur le sujet. Cette exposition est censée durer jusqu’au 24 janvier 2016, mais plusieurs voix se sont élevées pour réclamer sa fermeture.
Ce qui pose un réel problème, c’est que cette exposition ne comprend pas seulement 62 œuvres d’artistes afro-américains prêtées par Bill Cosby pour la première fois, mais également des citations, des tableaux et des photographies le représentant lui et des membres de sa famille. De plus, sa fille, Erika Ranee Cosby, participe activement en exposant ses propres peintures aux côtés de chefs-d'œuvre de l'art africain. Pour Jonathan Jones du Guardian, « le Smithsonian devrait avoir honte » de participer à la publicité des membres de la famille Cosby, qui se présentent comme de bons citoyens afro-américains.
Une nouvelle révélation, relayée par Hyperallergic notamment, est venue tout récemment relancer les critiques. Il semblerait que le Smithsonian a délibérément essayé de cacher le fait que Bill Cosby et sa femme Camille ont financé quasiment en totalité l’exposition. Selon Associated Press (AP), le couple a fait don de 716 000 dollars, un montant qui « couvre pratiquement la totalité des coûts ».
Cependant, le communiqué de presse et le catalogue de l'exposition ne comportent aucune mention de ce financement, alors qu’en général le nom du donateur apparait toujours sur les documents. AP souligne que cela entre en contradiction avec les principes éthiques des musées qui veulent que les sources de financement soient rendues publiques dans de tels cas. Le Smithsonian prétend que l'information était disponible à toute personne qui l'aurait demandée. Le musée a sans doute tenté d'atténuer la controverse que cette nouvelle aurait provoquée, ce qui est à présent le cas.
Le Smithsonian est jusqu’à présent resté extrêmement silencieux sur le sujet. Sa directrice Johnnetta Cole a refusé de parler de l'exposition. Comme le note l’AP, sa relation avec la famille Cosby remonte au moins à deux décennies, au moment où elle était présidente du Spelman College, pour laquelle Camille Cosby a donné 20 millions de dollars. Par ailleurs Camille Cosby est également membre du conseil d’administration du musée. « Cela fait lever quelques sourcils qu’un membre du conseil d’administration d’un musée prête sa propre collection, finance en partie l’exposition, et que l’exposition mette en avant des œuvres d’artistes peu connus dont le travail est considéré par certains comme sous évalué », réagit l’expert du marché de l’art Noah Kupferman. « Repositionner soudainement les œuvres de ces artistes comme importantes pourrait avoir un effet positif sur leur valeur économique ».
Interrogé par AP, Richard Kurin, sous-secrétaire de l'institution pour l'art, l'histoire et la culture, a reconnu les allégations de violence sexuelle, mais a souligné qu’elles ne sont pas pertinentes. Un communiqué a été publié le 7 juillet sur le site du musée : « Le National Museum of African Art est conscient des récentes révélations sur le comportement de Bill Cosby. Le musée ne cautionne en aucun cas ce comportement. Notre exposition « Conversations » […] concerne fondamentalement les œuvres et les artistes qui les ont créées, pas les propriétaires des collections ».
Une trentaine de femmes accusent depuis des mois l'ex-star de télévision de viol ou d'agression sexuelle sur une période de plus de 40 ans, affirmant pour la plupart avoir été droguées à leur insu. Après des années de déni, un document de justice rendu public le 6 juillet a révélé que l'acteur avait admis en 2005 avoir drogué au moins une femme dans le but d'avoir des relations sexuelles. Bill Cosby avait précisé qu'il ne parlait que d'une jeune femme, qui à l'époque avait porté plainte, et avec laquelle il avait ensuite passé un accord confidentiel.
A la suite de cette révélation, une statue de bronze à son effigie a été retirée le 7 juillet du parc d'attraction « Disney's Hollywood Studios » en Floride. Mais il existe encore de nombreux hommages au comédien disséminés sur le territoire américain.
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Le Smithsonian National Museum of African Art pris dans la tourmente Cosby
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Abonnez-vous dès 1 €Bill Cosby en 2006 © Photo sous Licence Domaine public via Wikimedia Commons