Partiellement fermé depuis quatre ans, le Grand Palais a fait l’objet d’une réflexion sur son avenir sans qu’aucun crédit n’ait été engagés depuis. Faute d’une décision politique rapide et d’un budget proche du milliard de francs, le bâtiment ne pourra être disponible pour la grande exposition de l’an 2000 souhaitée par le chef de l’État.
Pas un franc n’a été programmé dans le budget 1997 de la Culture pour la restauration du Grand Palais. La situation est au point mort depuis la fermeture de la grande nef, en 1993, après la chute d’un boulon du haut des 44 m de la structure métallique de la verrière, qui fit brutalement prendre conscience de l’instabilité croissante et dangereuse de l’édifice. Des mesures conservatoires étaient adoptées aussitôt et, en 1995, le président de l’Établissement public du Grand Louvre, Jean Lebrat, était chargé d’une étude d’expertise technique et de réflexion quant à l’"avenir" du lieu.
Dans son rapport remis en 1996, Jean Lebrat n’a retenu que trois occupants "légitimes" : la grande nef à usage polyvalent, les galeries d’expositions de la RMN et le palais de la Découverte. "Puisqu’il sera nécessaire de creuser pour la reprise des fondations, explique-il, je suggère qu’un niveau de sous-sol soit réalisé afin d’accueillir des espaces techniques et des réserves, mais en aucun cas un parking automobile". Dans toutes les hypothèses, les occupants non "légitimes" – commissariat de police, université, direction régionale des affaires culturelles… – doivent libérer les lieux, un préalable désormais admis de façon unanime. Cela permettrait de redonner à la grande nef les surfaces (10 000 m2 en plus) qui lui font défaut pour redevenir le rendez-vous international des manifestations de prestige qui manque à la capitale. Demeure en suspens l’affectation des espaces satellites à la grande nef. Dans ses différents scénarios, Jean Lebrat envisage entre autres de déplacer le palais de la Découverte vers la Seine, voire même son départ pur et simple. Dès lors, les galeries d’expositions pourraient s’étendre en sous-sol ou, mieux, s’installer en lieu et place du musée scientifique. Elles bénéficieraient alors d’un espace mieux adapté et surtout d’un éclairage zénithal. Mais l’Éducation nationale oppose une vive résistance à une telle hypothèse, même si certains ont imaginé un renouveau du palais de la Découverte en suggérant son transfert à Lyon.
Trente mois de travaux
L’arbitrage entre ces différents schémas doit être tranché au plus haut niveau de l’État qui, de l’avis de Jean Lebrat, devrait en tant que propriétaire et quel que soit le parti retenu, assumer les travaux de gros œuvre sur le bâti. Il en coûterait près d’un milliard de francs pour la reprise des fondations, la rénovation de la structure métallique rongée par la rouille, le remplacement de pièces de la charpente et d’éléments de la verrière et de la toiture. Dans l’attente d’une décision politique, le Grand Palais continue de s’enfoncer dans le sol, côté Seine, à raison d’un à deux millimètres par an. "Les études techniques sont ficelées, et nous sommes prêts à lancer les appels d’offres aux entreprises dès l’automne", assure Jean-Loup Roubert, l’architecte en charge de l’édifice, qui met en garde les autorités : "Il sera absolument impossible de réaliser les travaux en moins de trente mois".
Dès lors, rue de Valois comme à l’Élysée, conscience doit être prise que l’opération doit démarrer tambour battant si Paris veut accueillir l’exposition de haute tenue célébrant l’an 2000, imaginée par le chef de l’État. Jacques Chirac a en effet émis le souhait de voir rassemblées 2 000 œuvres emblématiques des principaux courants artistiques et culturels de l’humanité, y compris les cultures dites "primitives", "2 000 matrices", selon l’expression de Jacques Kerchache, éminence grise du projet présidentiel. Restent deux ans et demi, pas davantage, pour offrir à pareil dessein l’écrin approprié !
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Le Grand Palais oublié
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°34 du 1 mars 1997, avec le titre suivant : Le Grand Palais oublié