CHARLEROI (BELGIQUE) [27.02.15] – Le maire de Charleroi a adressé une lettre au New York Times et au jury du World Press Photo afin de demander le retrait du prix attribué le 12 février 2015 à Giovanni Troilo, qui dans sa série photographique Le cœur noir de l’Europe dépeindrait une vision déformée et falsifiée de la ville.
L’attribution, le 12 février 2015, du prix World Press Photo au photographe italien Giovanni Troilo dans la catégorie « problématiques contemporaines » ne semble pas être du goût de la ville de Charleroi. Le projet photographique primé, intitulé Le cœur noir de l’Europe, prend pour sujet la ville belge et ne la dépeindrait pas sous son meilleur jour.
Assistant à l’engouement médiatique relatif aux remises de prix du World Press Photo, le maire de Charleroi Paul Magnette à décidé de réagir en adressant le 25 février 2015 un courrier au New York Times et au jury du World Press Photo, demandant le retrait du prix au photographe italien, rapporte le site OAI13. Le maire accuse le projet du photographe italien de désinformation. Les photographies, présentées comme un reportage composé de prises de vue spontanées, seraient « mises en scène ». Giovanni Troilo présente les intentions de sa série photographique en des termes peu flatteurs pour la ville de Charleroi : « Aujourd’hui, le malaise social s’insère dans la vie des citoyens [de Charleroi]. Les routes, qui étaient à l’époque propres et fleuries, sont aujourd’hui abandonnées et en mauvais état. Les usines ferment et la végétation reprend ses droits dans les vieux quartiers industriels. Seuls une sexualité perverse et tordue, une haine raciale, une obésité névrotique ou un abus de drogues semblent être les solutions pour rendre ce malaise endémique acceptable. Charleroi est le reflet de ce qu’il se passe à plus grande échelle en Europe. Est-ce que nous devons rester ensemble alors que notre mission principale a échoué ? Allons-nous avoir une seconde chance ? C’est cette question qui est posée à l’Europe aujourd’hui, c’est cette question qui est posée à la ville de Charleroi, le cœur noir de l’Europe ».
La rédaction du site OAI13, qui a pu avoir accès au contenu de la lettre du maire, rapporte que selon ce dernier, ce sujet est « littéralement monté de toutes pièces » et constitue « une grave falsification de la réalité portant préjudice à la Ville de Charleroi et à ses habitants ainsi qu’au métier de photojournaliste ». La « mise en scène » dont il taxe le photographe doit pour lui rester un outil de la photographie artistique et ne devrait pas être utilisée dans la photographie de presse. « Le caractère falsifié et mensonger des légendes, le travestissement de la réalité, la construction d’images chocs mises en scène par le photographe, malhonnêtes et qui trahissent les bases de l’éthique journalistique », écrit-il.
Il prend en exemple une photographie d’un homme visiblement en surpoids, assis demi-nu dans la pénombre de son logement : « L’éclairage dramatique de la scène et la légende de la photo laisse penser que cette personne vit recluse chez elle pour fuir la violence de son quartier. Il s’agit en fait de Philippe Genion, une personnalité bien connue à Charleroi et qui manifestement au vu des photos référencées sur Google aime poser torse nu. Il habite dans un quartier populaire mais relativement paisible. Sa magnifique maison est également un bar à vin […] Monsieur G. est une personnalité en vue, truculente et très attachée à sa région. Bien loin de l’image donnée de lui par le photographe qui semble avoir voulu construire son image faisant référence à la ‘neurotic obesity’ mentionnée dans le texte d’introduction de Giovanni Troilo ».
Il termine en s’adressant à la présidente du jury : « Je ne suis certainement pas un expert de la photographie. Mais je sais qu’en journalisme, tout comme en photographie, le choix de donner un axe à son sujet est nécessaire et habituel. Néanmoins, de cacher certaines perspectives avec de l’information non vérifiée et déformée, de tordre la réalité en faisant de la mise en scène, c’est tout sauf du photojournalisme. Du moins, ce n’est pas le photojournalisme de qualité que vous avez l’habitude de récompenser […] Nous vous demandons de retirer le prix qui a été accordé à Mr Troilo à la lumière de notre argumentation et nos explications ».
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La ville de Charleroi demande officiellement le retrait d’un sujet primé au World Press Photo
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Abonnez-vous dès 1 €Hôtel de ville de Charleroi - © Photo Jmh2o - 2012 - Licence CC BY-SA 3.0