ART CONTEMPORAIN

La Paris Art Week en mode Jeux olympiques

Par Jean-Christophe Castelain · Le Journal des Arts

Le 2 octobre 2024 - 767 mots

La réouverture du Grand Palais pour Art Basel Paris est l’un des temps forts très attendus par les galeries pour donner un effet JO à un marché maussade.
Paris. La semaine de l’art contemporain qui ambitionne d’aller au-delà d’une simple manifestation commerciale autour d’Art Basel Paris et des foires satellites va-t-elle secouer la morosité ambiante ? Et cela un peu à l’instar des Jeux olympiques qui ont su faire souffler un vent d’optimisme dans une capitale initialement rétive. La foire suisse ne va-t-elle pas réinvestir le Grand Palais, l’un des symboles des JO 2024 ? Rien n’est moins sûr, à tout le moins sur le plan du marché de l’art. Celui-ci est en panne depuis plusieurs mois (depuis le début de la guerre à Gaza) et les galeries sont autant concernées que les maisons de ventes.

Ce n’est en tout cas pas la fête de la création française. MCH qui organise Art Basel Paris n’a pas profité du retour au Grand Palais qui offre pourtant plus d’espace, pour augmenter la part des galeries françaises : elles ne sont que 45 contre 44 l’an dernier alors que le nombre de galeries est passé de 154 à 192. Les galeries anglo-saxonnes dépassent largement les galeries françaises (59), en particulier les marchands américains, habitués d’Art Basel à Bâle et à Miami venus très nombreux (43). La force du géant suisse est de jouer sur son réseau pour attirer les grandes galeries étrangères et les collectionneurs internationaux.

Quant aux foires satellites, la plupart font la promotion de scènes étrangères. La justement nommée Paris Internationale accueille seulement huit galeries françaises parmi les 72 qui y exposent. Also Known as Africa (AKAA) qui fait la promotion de l’art contemporain africain revient au Carreau du Temple dans une version qui s’étiole progressivement, sans la présence des galeries spécialisées telles que Cécile Fakhoury. Asia Now, qui comme son nom l’indique sert de vitrine à l’art asiatique, réinvestit la Monnaie de Paris dans un joyeux désordre avec une offre qui, elle, n’est cependant pas toujours très enthousiasmante. Il n’y a finalement que Moderne Art Fair et Design Miami Paris pour soutenir la création française. Mais l’ex-Art Élysées, qui peut se réjouir de la réouverture du Grand Palais à deux pas de ses tentes le long des Champs-Élysées, accueille surtout des galeries classiques. De son côté, Design Miami Paris a opportunément su tirer parti de l’absence de design à Art Basel (contrairement à la Fiac) en accueillant 13 marchands français sur la vingtaine d’exposants.

Il revient donc aux galeries de se soutenir par elles-mêmes (ce qui ne veut pas forcément dire soutenir la création française). Le Comité professionnel des galeries d’art (CPGA) organise en amont de l’ouverture des foires une « semaine du marché de l’art moderne et contemporain » avec de nombreuses nouvelles expositions. La particularité de la manifestation est de démarrer un dimanche alors que les galeries sont traditionnellement fermées ce jour-là.

Pour autant la manifestation intitulée « Starting Sunday » n’échappe pas aux anglicismes qui font florès dans le milieu. Non sans susciter une certaine perplexité. Ainsi Art Basel a intitulé sa nouvelle section qui ressemble un peu à Frieze Masters, « Premise » considérant sans doute que sa traduction littérale « Prémisse » est trop franchouillarde.

À défaut de secouer la torpeur du marché et promouvoir la scène française, la semaine parisienne de l’art a au moins le mérite de créer une dynamique au-delà des enceintes des foires. Si MCH a rangé dans le placard sa promesse d’organiser une manifestation qui dépasse les arts plastiques, il poursuit le programme public lancé en son temps par la Fiac. Une dizaine de lieux prestigieux parisiens accueillent des installations ou des sculptures monumentales ; comme une sculpture de Niki de Saint Phalle sur le Parvis de l’Institut de France ou des installations de John Chamberlain, Yayoi Kusama ainsi qu’une Maison démontable de Jean Prouvé sur l’avenue qui sépare le Grand du Petit Palais qui sera fermée à la circulation. Si le traditionnel jardin des Tuileries ne figure pas cette année dans le parcours pour cause de rénovation après les JO, les jardins du Palais Royal servent pour la première fois d’écrin à une dizaine de sculptures du XXe siècle dont un Pouce de César.

L’impression de bouillonnement vient de la concomitance d’inauguration des grandes expositions dans les musées et fondations parisiens : le pop art à la Fondation Vuitton, l’âge atomique au Musée d’art moderne de Paris, l’Arte povera à la Bourse de commerce ou Caillebotte à Orsay. C’est ce bouillonnement qui peut inciter les collectionneurs étrangers à venir à Paris et ouvrir leur portefeuille dans les foires ou dans les ventes publiques qui se tiennent au même moment.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°640 du 4 octobre 2024, avec le titre suivant : La Paris Art Week en mode Jeux olympiques

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