L’image est facile, mais irrésistible. Liée forcément à l’ascendance écossaise de Brendan MacFarlane : le monstre du Loch Ness aurait-il quitté les profondeurs abyssales de son lac montagnard pour venir s’échouer à Paris en bord de Seine ?
Vu depuis le quai de la Rapée, de l’autre côté du fleuve, le long serpentin couleur vert d’eau s’étire sur 280 mètres, en surplomb de la Seine, faisant basculer la monolithique structure datant de 1907 à laquelle il s’accroche dans un futur technologique inattendu.
Jakob et MacFarlane, Dominique et Brendan, un duo d’architectes quarantenaires, fleuron de la génération émergente, qui s’est déjà taillé une réputation flatteuse grâce à quelques réalisations plus que convaincantes, parmi lesquelles Le Georges, restaurant perché sur les hauteurs du Centre Pompidou, ou le Centre de communication Renault installé dans le fameux « 57 Métal » de Claude Vasconi à Boulogne-Billancourt (lire le JdA no 216, 27 mai 2005). Jakob et MacFarlane dont on attend avec impatience les futurs centre d’architecture du FRAC (Fonds régional d’art contemporain) Centre à Orléans et Conservatoire de musique et danse à Noisy-le-Sec (Seine-Saint-Denis).
Mais revenons en bord de Seine, à l’aplomb de la gare d’Austerlitz, où ils mettent la dernière main à la « Cité de la mode et du design », dont ils ont remporté le concours en 2005, s’affrontant notamment à Future Systems, Manuelle Gautrand, Finn Geipel et Reichen et Robert. Objectif du concours : récupérer, réhabiliter et reconvertir un des éléments majeurs du port de Paris, lieu de transit entre circulation fluviale et ferroviaire, devenu par la suite un important point de vente de tapis et moquettes. Soit un bloc monolithe de 280 mètres de long sur 40 mètres de profondeur, culminant à 17 mètres et destiné à devenir le cœur battant de la mode et du design à Paris, « capitale de la création ». Avec la Caisse des dépôts et consignations comme investisseur, la Ville de Paris comme programmateur et une nuée d’opérateurs parmi lesquels l’Institut français de la mode – ou l’école la plus huppée qui soit en matière de haute couture, gardienne des traditions et exploratrice de l’imagination. Lequel Institut occupera trois niveaux côté ouest de l’ensemble. Au premier étage, un immense plateau accueillera événements, défilés et expositions au gré de la programmation. Le reste, au fil des étages, sera réparti entre showrooms, boutiques, cafés et restaurants. Au sommet de l’ensemble, sur le toit, l’Institut et un restaurant haut de gamme encadreront une immense terrasse publique.
Livrée en mai prochain, la Cité n’ouvrira au public qu’en septembre, le temps que les « preneurs » d’espaces effectuent leurs travaux spécifiques et s’installent.
Jakob et MacFarlane récupèrent la structure existante et l’exploitent au mieux, y greffant ce qu’ils nomment le « plug over », immense et légère structure de verre et d’acier qui enserre, enveloppe, se fond tout en gardant son autonomie. En surplomb de la Seine, elle est tout à la fois circulation, promenoir, coursive, balcon, évocation de docks et de traversées au long cours.
Depuis le « plug over » et le toit-terrasse, les vues sur Paris sont, de jour comme de nuit, tout à fait saisissantes. Quant à la vue qui s’offre depuis les ponts ou l’autre rive, elle est encore plus étonnante de nuit. Au monstre du Loch Ness succède alors une étrange lumière verte qui se reflète dans les eaux troubles du fleuve. Jakob et MacFarlane ont demandé au magicien de la lumière, Yann Kersalé, qui a si bien transfiguré les ports de Douarnenez ou de Saint-Nazaire, d’y aller de sa petite musique de nuit. Le long serpentin se transfigure alors en une longue, étrange et sinueuse symphonie visuelle, tandis qu’au sommet de l’édifice, l’immense terrasse végétalisée s’anime de milliers de diodes.
Paris Ville Lumière.
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Jakob Macfarlane
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°279 du 11 avril 2008, avec le titre suivant : Jakob Macfarlane