MARSEILLE
Grâce à une restauration réussie, le château Borély abrite dorénavant une belle collection d’arts décoratifs, mise en valeur par une scénographie élégante et audacieuse
MARSEILLE - C’est une belle endormie de plus qui vient de se réveiller à Marseille. Quelques jours après le palais Longchamp, le château Borély vient de rouvrir ses portes après dix années de fermeture. Le site a bénéficié d’une requalification complète des lieux, de la cour d’honneur aux pavillons extérieurs, en passant par les façades, menuiseries, planchers et décors peints : un chantier d’envergure débuté en 2008, pour un montant global de près de 20 millions d’euros dont 16 millions apportés par la Ville de Marseille. Si la façade du nouveau musée est bien connue des visiteurs du parc Borély, l’intérieur du château n’était plus accessible depuis 2004 pour des raisons de sécurité, tandis que le premier étage était fermé à la visite depuis 1989, date à laquelle l’ancien musée d’archéologie, a été transféré à la Vieille Charité.
C’est dire si l’attente était forte pour un monument que l’on sait d’un grand intérêt. La restauration en a été confiée à François Botton, architecte en chef des Monuments historiques : un travail de longue haleine pour redonner vie aux décors de gypseries et aux peintures murales de cette bastide du XVIIIe siècle, unique témoignage du faste et du luxe des grandes familles marseillaises de l’Ancien Régime. Car la façade au classicisme austère révèle un intérieur au riche programme décoratif inspiré par les palais romains. Le plafond du vestibule d’accueil, exécuté par Louis Chaix, peintre originaire d’Aubagne et envoyé par les Borély à Rome pour y copier les maîtres, est une œuvre d’après Guido Reni, dont la seule restauration a duré plus de huit mois. L’iconographie des décors de la bastide, dédiée au Soleil, dénote la culture exceptionnelle de son commanditaire, Louis Joseph Denis Borély (1731-1804).
Mention spéciale pour le cabinet de toilette
C’est dans ce lieu d’exception que la Ville a eu la bonne idée de rassembler les collections du Musée de la faïence, jusqu’alors excentré à la villa Pastré ; celles du Musée de la mode, fermé depuis 2010 ; les objets textiles et le mobilier issus du Musée Cantini comme du château Borély, sans compter des dépôts du Musée des arts décoratifs de Paris et de la Cité de la céramique à Sèvres. « Il fallait jouer avec le contenu comme avec l’écrin », souligne la conservatrice du musée, Christine Germain-Donnat. Soit 2 500 œuvres d’une grande diversité de techniques, du XVIIe siècle à nos jours, répartis sur une surface d’exposition de 1 600 m2. Faïences et porcelaines y tiennent le haut du pavé, avec 1 000 pièces de céramique exposées, un choix logique compte tenu de la qualité de la faïence provençale dans les collections municipales.
L’agence Moatti et Rivière a réalisé une scénographie audacieuse et truffée de trouvailles techniques pour préserver les lieux. « Nous avons choisi de ne laisser apparente aucune trace technique, pour garder l’esprit de la bastide », explique l’architecte Alain Moatti. Eu égard aux contraintes climatiques et normes d’hygrométrie, le cabinet d’architecture a conçu des plafonds suspendus en coque de résine qui jouent sur les reflets et l’éclairage de la pièce. Il a aussi proposé des tommettes contemporaines aux matières inattendues (bronze, bois, marbre, ciment) là où les sols originels étaient perdus, des adjonctions contemporaines qui se mêlent avec élégance à l’édifice.
Le parcours alterne salles muséographiques et « period rooms » aux décors et au mobilier préservé ou restitué : parmi ces huit pièces conservées figurent le Salon doré avec sa célèbre radassière, grande banquette en tapisserie lovée dans une alcôve à colonnes, et la chambre d’apparat recouverte d’une tenture d’indiennes à motif d’arbre de vie. La scénographie s’appuie sur les transparences et les jeux de lumière, avec une mention spéciale pour le cabinet de toilette, une petite pièce ovale où la collection de flacons de sel du XIXe reçoit un traitement très graphique et lumineux. Pour la mode, l’accrochage se concentre sur une vingtaine de pièces axées périodiquement sur des thématiques précises, avec, en ouverture, « L’impression et la mode ». Un des pavillons extérieurs devrait prochainement faire office d’espace d’exposition temporaire, un équipement fondamental pour faire de ce très bel outil un lieu central de la culture à Marseille.
Château Borély, parc Borély, 134, avenue Clot-Bey, 13008 Marseille, tél. 04 91 62 21 82, tlj sauf lundi, 10h-18h.
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Marseille ouvre son Musée des arts décoratifs
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Abonnez-vous dès 1 €Musée des arts décoratifs de Marseille et vue de sa salle consacrée à l'Art nouveau © Photo Ville de Marseille
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°395 du 5 juillet 2013, avec le titre suivant : Marseille ouvre son Musée des arts décoratifs