De Paris, où il avait fait sa carrière artistique, le peintre basque-espagnol Ignacio Zuloaga déclarait qu’il lui serait toute sa vie reconnaissant.
C’est que Paris l’a reconnu bien avant son propre pays. Il s’est d’abord exercé à la peinture dans l’atelier de son père, puis au Prado, où il copie Vélasquez, Goya, Le Greco. Mais il veut aller voir ailleurs. À la fin de l’année 1889, le voici dans la capitale française. Si son œuvre prend sa source dans le pays qui le vit naître, son expérience parisienne est nécessaire pour comprendre son travail. C’est sur cette période qui marque son extraordinaire ascension que se concentre l’exposition de la Fondation Mapfre, « Zuloaga dans le Paris de la Belle Époque », composée de quatre-vingt-dix toiles, dont quelques véritables chefs-d’œuvre. Installé à Montmartre, Zuloaga s’inscrit dans deux académies, l’une dirigée par Gervex, l’autre présidée par Eugène Carrière, qui contribua, ainsi que ses camarades d’atelier Casas et Rusinol, à l’orienter vers les thèmes espagnols auxquels son tempérament s’adaptait mieux. Parallèlement à sa formation, une imprégnation artistique s’opère au contact des peintres confirmés de Montmartre : Toulouse-Lautrec rend son dessin plus léger. Le Portrait de Mlle Valentine Dethomas doit à Gauguin et au Synthétisme pour la schématisation du paysage. Même porosité dans le portrait qu’il fait de son ami Émile Bernard. Le superbe Retrato de Madame Malinowska illustre sa proximité avec Manet, dont il a vu les œuvres dans l’atelier de Gervex. Zuolaga est le plus célèbre artiste espagnol à résider dans la capitale, ce qui lui vaut de réaliser l’un des plus beaux portraits de la femme la plus connue de la haute société parisienne, Anna de Noailles. Mais il est surtout l’un des derniers grands peintres espagnols, au sens de ceux qui imposent l’hispanisme à l’étranger et non l’inverse. Car l’influence de la peinture classique et des maîtres espagnols est inhérente à son œuvre : l’extraordinaire portrait de La Naine Dona Mercedes est à l’évidence un hommage appuyé à Vélasquez, quant à ce paysan ségovien au visage émacié dans un paysage d’orage, il pourrait être un personnage du Greco. Tout au long de ce parcours où l’accrochage est très dense, la constante de Zuloaga est là : participant de deux cultures, l’artiste est un Espagnol « francisé ». Le portrait ambigu de Maurice Barrès devant Tolède en est le parfait témoignage. Portrait double, deux époques, deux peuples.
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Ignacio Zuloaga peintre double
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°706 du 1 novembre 2017, avec le titre suivant : Ignacio Zuloaga peintre double