AMPHIPOLIS (GRÈCE) [12.08.15] - Il y a un an, c'était le suspense archéologique des dernières années, voire du siècle. Aujourd'hui, on n'en parle plus. Le tombeau d'Amphipolis, le plus grand jamais trouvé en Grèce, semble être retombé dans l'oubli.
Le site, situé en Macédoine, au nord de la Grèce, est désert, sous le chant des cigales. Difficile d'imaginer la frénésie médiatique qui s'est emparée de la Grèce en août 2014 lorsque les autorités de l'époque, au vu de ce que donnaient les fouilles, ont qualifié de trouvaille archéologique "unique" ce tombeau connu de longue date.
Aujourd'hui, il n'y a plus qu'un jeune garde qui refuse de donner son nom, mais dit que "plus personne ne travaille ici", et que "le projet est gelé, comme tout dans le pays".
C'était devenu le feuilleton à suspense de l'automne. Peu à peu, on mettait au jour des sphinges de belle dimension, des cariatides, un sol en mosaïque magnifique. Des communiqués étaient envoyés à la presse, avec les photos des découvertes successives, alimentant l'intérêt. Des conférences de presse étaient organisées.
Et si c'était le tombeau d'un proche d'Alexandre le Grand, mort en 323 avant Jésus Christ, à l'âge de 32 ans ? Sa mère, Olympias ? Ou sa femme, Roxane ? Ou un de ses généraux ?
Et si c'était Alexandre lui-même, se demandaient les plus téméraires, malgré les mises en garde des historiens sur l'impossibilité qu'il s'agisse du roi lui-même. Il est mort à Babylone et, vers le quatrième siècle après Jésus Christ, on a perdu la trace du somptueux tombeau qui abritait sa dépouille, à Alexandrie, en Egypte.
On a fini par découvrir à Amphipolis cet hiver les restes de cinq personnes, une femme âgée, deux hommes, un nouveau-né, une autre de sexe inconnu, et des animaux, dont un cheval.
On a pu attribuer jusqu'à présent 157 des 550 fragments retrouvés à ces différentes personnes. Mais on ne sait toujours pas de qui il s'agit.
Outre l'argent qui manque, Amphipolis semble d'autant plus abandonnée aujourd'hui que c'est l'ancien Premier ministre conservateur Antonis Samaras, battu en janvier par le président du parti de gauche radicale Syriza, Alexis Tsipras, qui s'en était fait le promoteur l'an dernier, jouant sur le sentiment de fierté nationale.
Dès le mois de mars, le nouveau ministre de la culture Nikos Xydakis avait publiquement critiqué l'administration précédente pour avoir fait des fouilles "un show".
- 'Fiasco' -
Mardi, le ministère de la Culture a fait comprendre que le tombeau n'était pas près de s'ouvrir aux visiteurs : "le travail à entreprendre pour protéger, réhabiliter et mettre en valeur le monument est énorme".
Selon le ministère, 200.000 euros ont été mis de côté pour consolider le tumulus. Mais le contrôle des capitaux, en vigueur depuis fin juin dans le pays, a obligé à différer les travaux.
De surcroît, une querelle d'experts a éclaté récemment pour savoir si le tombeau remonte bien à l'époque des rois de Macédoine, ou s'il est plus banalement romain.
Le quotidien Avgi, très proche du parti Syriza, a révélé dimanche qu'un groupe d'experts avait daté la tombe du premier ou du deuxième siècle avant Jésus-Christ, c'est-à-dire jusqu'à trois cents ans après la mort d'Alexandre.
Le quotidien a qualifié de "fiasco" les tentatives précédentes de lier le tombeau à la famille du roi.
Cela a déclenché la colère de Katerina Peristeri, l'archéologue chargée des travaux, très courtisée par les médias l'année dernière.
Elle a écrit au journal pour défendre sa propre évaluation. Pour elle, "le complexe funéraire a bien été construit à la fin du quatrième siècle avant Jésus-Christ", soit autour de 325 à 300, "tout en étant utilisé jusqu'à l'époque romaine".
Mme Peristeri assure qu'une évaluation complète sera faite à l'automne.
Le tombeau, qui mesure 500 mètres de circonférence, a été creusé dans une colline haute de 30 mètres.
L'emplacement de la tombe est connu depuis l'Antiquité, et il a sans doute été pillé à plusieurs reprises après la conquête de la Macédoine par Rome au deuxième siècle avant Jésus-Christ, ce qui n'aide pas à l'identification de ses occupants.
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Grèce : un an après, le prometteur site d'Amphipolis semble rendu à l'oubli
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Abonnez-vous dès 1 €Vue du delta du Strymon et du gymnase depuis l'acropole d'Amphipolis © Photo Marsyas - 2005 - Licence CC BY-SA 3.0