Monde Flottant - De tous les membres du groupe des Nabis, séduits et emportés par la vague du japonisme, tels Pierre Bonnard surnommé le « Nabi japonard », Édouard Vuillard est celui qui a le plus collectionné les estampes japonaises.
Achetées bon marché, ces dizaines de gravures signées Hiroshige, Hokusai ou Utamaro tapissaient les murs de son appartement parisien, comme en témoignent de nombreuses photographies d’époque. À la Fondation de l’Hermitage, une soixantaine de ces « images du monde flottant » représentant des paysages, des acteurs de kabuki, des courtisanes ou des scènes de la vie quotidienne ponctuent le parcours : elles forment un beau contrepoint à la centaine de peintures et gravures de Vuillard ici présentées. Sur la forme, à première vue, rien de commun entre les aplats de couleur finement dégradés, les formes clairement découpées des gravures nippones et les mosaïques aux tons brouillés du peintre parisien. Et on cherchera en vain des réminiscences de motifs japonisants dans les toiles de Vuillard : pas de kimono ni de geishas ou de branches de cerisier en vue. Mais, grâce à cette confrontation, on comprend mieux, au fil des salles, ce qui a inspiré le peintre dans les années 1890-1914, à l’acmé de sa carrière. Les thèmes choisis d’abord, ceux de la nature, du paysage et de la vie quotidienne : l’espace intime de la maison, de la chambre à coucher, les scènes de vie ordinaire – la nourrice et le bébé, les promenades d’enfants au parc – traitées avec une apparente simplicité chez Vuillard, et plus tard ses paysages de bord de mer, font écho aux représentations de moments suspendus qui caractérisent les estampes japonaises contemporaines. Et, surtout, les « codes esthétiques » qu’a empruntés Vuillard au Japon : ces audacieuses compositions et ces cadrages originaux, ces formes simplifiées, ces formats inusuels enfin. Le peintre parisien ose ainsi s’essayer à la réalisation de longs tableaux horizontaux et à des séries de panneaux décoratifs construits à la façon d’un paravent ou se risquer à représenter ses protagonistes de dos voire à moitié dissimulés derrière des objets. De la pure expérimentation.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Une leçon d’art nippon
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°768 du 1 octobre 2023, avec le titre suivant : Une leçon d’art nippon