Art contemporain

Rouen (76)

Une déflagration pointilliste

Musée des beaux-arts – Jusqu’au 5 mars

Par Amélie Adamo · L'ŒIL

Le 20 décembre 2023 - 297 mots

Résonance.  - Voilà plusieurs années qu’avec La Ronde, le Musée des beaux-arts de Rouen lance des appels à projet pour inviter des artistes à dialoguer avec les collections.

Parmi la centaine de candidatures sélectionnées, le peintre Alioune Diagne est l’un des heureux élus. Répondant au thème imposé cette année, le fleuve, son travail s’intéresse à l’exil et à l’histoire du Sénégal. Soulevant les problèmes géopolitiques liés à la pêche maritime dans ce pays, le projet d’Alioune évoque les difficiles conditions de la population. Parti sur le terrain comme un ethnologue, l’artiste s’est rapproché des pêcheurs, laveuses, enfants, vivant au bord du fleuve Sénégal. Ses nombreux croquis et notes ont servi de base à son travail, l’artiste créant une série de peintures nourries à la fois par cette enquête de terrain et par les œuvres conservées au musée de Rouen. Le dialogue entre la peinture d’Alioune, et celle des maîtres de l’impressionnisme et de l’école de Rouen, donne matière à penser. Si sa pratique résonne avec la technique pointilliste, elle trouve son origine dans une expérience personnelle : Alioune a peint ses premiers portraits en dessinant des signes colorés, sorte de formes calligraphiques directement inspirées par le travail d’écriture de son grand-père, maître coranique. Par cette technique, qui joue beaucoup avec le blanc de la réserve laissée entre les signes, la peinture d’Alioune se charge d’une intensité claire, aveuglante, en écho avec la tradition impressionniste du plein air et de l’atmosphère lumineuse. Mais ce qui marche le mieux, dans ce jeu de confrontation, c’est lorsque l’artiste joue la différence « politique », la déflagration du sens : il y a un monde entre le bien-être des loisirs bourgeois dépeints par les impressionnistes, et le fleuve observé par Alioune, dont la vision renvoie à un usage domestique, de labeur et de précarité.

« La Ronde 7, fleuves. Alioune Diagne »,
Musée des beaux-arts, esplanade Marcel Duchamp, Rouen (76), mbarouen.fr

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°771 du 1 janvier 2024, avec le titre suivant : Une déflagration pointilliste

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