Un tour des galeries (II)

Par Roger Bevan · Le Journal des Arts

Le 1 mars 1996 - 1397 mots

LONDRES : PACE-WILDENSTEIN RÉCUPÈRE LA SUCCESSION DE BARBARA HEPWORTH

La succession de Barbara Hepworth, qui comprend semble-t-il 250 sculptures, a quitté Marlborough Fine Art pour rejoindre Pace-Wildenstein. L’accord signé par le président de Pace-Wildenstein et les administrateurs de la succession (parmi lequels figurent deux anciens directeurs de la Tate Gallery) marque le début d’une campagne visant à faire entrer les œuvres dans de grandes collections américaines.

En vue de l’importante exposition Hepworth qui devrait se tenir début 1997 à la galerie Pace-Wildenstein de Los Angeles, les administrateurs ont fait revenir des œuvres prêtées au Yorkshire Sculpture Park et à d’autres musées britanniques. C’est Madeleine Bessborough, propriétaire du New Art Centre, qui sert d’intermédiaire entre la succession Hepworth et Pace-Wildenstein. Elle continuera d’exposer les sculptures de Barbara Hepworth dans le parc de Roche Court, sa maison-galerie près de Salisbury, à présent ouverte toute l’année. Ayant maintenant accès aux artistes américains représentés par Pace-Wildenstein, elle pourra bientôt inclure des œuvres de Calder, Louise Nevelson, Claes Oldenburg et Jim Dine dans son programme d’expositions.

Mes amis sont des génies
Max Wigram fête le second anniversaire de l’Independent Art Space, qu’il a ouvert en février 1994, avec une exposition de Jake Chapman intitulée "Certains de mes meilleurs amis sont des génies". Ceux-ci ont pour nom David Falconer, Russell Haswell, Tim Sheward, Sam Taylor-Wood, James White, Gavin Brown (son frère) et Gaby Chapman (sa sœur). L’exposition a lieu du 8 mars au 27 avril.
 
Au cours de ces deux années, Max Wigram a organisé huit expositions et conçu plusieurs autres manifestations de moindre envergure, tout en poursuivant sa propre carrière d’artiste. Au Smart Show de Stockholm, du 7 au 10 mars, il présente une nouvelle version de Routine for Life : James Bond’s Towel, performance au cours de laquelle il doit s’enrouler une serviette autour des reins. "Rien du tout", répond Wigram lorsqu’on lui demande ce qu’il porte sous la serviette.

Nouvelle voisine de Laure Genillard, Karsten Schubert et des Éditions Ridinghouse, le marchand suédois Lotta Hammer ouvre sa propre galerie le 21 mars, au 51-51 a, Cleveland Street. Elle prévoit de centrer son activité sur les jeunes artistes britanniques, et son exposition inaugurale réunira des photos et des dessins de Graham Gussin, du 22 mars au 27 avril.  Adam Chodzko sera le second artiste présenté par la galerie. Le critique d’art Andrew Renton y organisera également plusieurs manifestations.
 
Voisins eux aussi, Tommaso Corvi-Mora et Gregorio Magnagni feront l’ouverture de la galerie Robert Prime à la mi-mars.

Rachel Whiteread en tournée
Les vidéo-sculptures de Tony Oursler, exposées à la galerie Lisson jusqu’au 24 février, ont fait recette. Dès la deuxième semaine, onze des treize œuvres présentées étaient vendues, à des prix allant de 16 000 à 32 000 dollars. Au nombre des acheteurs, citons le Musée national d’art moderne d’Oslo, trois collectionneurs privés résidant à Londres, ainsi que la collectionneuse suisse Monique Barbier-Muller. Charles Saatchi, qui avait acheté trois œuvres en 1994,  lors de la précédente exposition, en a acquis deux autres et commandé une troisième. Elle figurera dans l’exposition "Jeunes Américains : nouvelles acquisitions d’art américain de la collection Saatchi (2e partie)", qui se tiendra du 21 mars au 28 avril, et réunira aux côtés d’Oursler Jacqueline Humphries, Richard Prince, Charles Ray et Kiki Smith. Tony Oursler a recréé l’installation de son œuvre maîtresse Judy (1994) pour le Sprengel Museum de Berlin, où l’on peut la voir jusqu’au 24 avril. Il exposera au Musée d’art moderne de San Diego  du 6 juillet au 20 octobre, ainsi qu’à la prochaine Biennale de Sydney du 24 juillet au 22 septembre.

C’est le projet de Rachel Whiteread pour le nouveau monument de  Vienne à la mémoire des juifs autrichiens victimes de l’Holocauste qui a finalement été couronné. Récente lauréate du troisième Prix Eliette von Karajan,  elle expose à Salzbourg du 30 mars au 20 avril. Comme il est peu probable qu’elle ait le temps de créer de nouvelles sculptures pour l’occasion, sans doute y présentera-t-elle des dessins et des gravures, à moins que son marchand Karsten Schubert puisse prêter certaines de ses œuvres.  Elle enchaînera avec une seconde exposition chez le marchand new-yorkais Luhring Augustine, du 7 mai au 18 juin, et une rétrospective organisée par la Tate Gallery à Liverpool, du 14 septembre au 23 novembre, reprise au début du printemps 1997 par le Centre d’art Reina Sofia à Madrid.
 
Charles Booth-Clibborn, chez Paragon Press, publie un nouveau portfolio de douze photo-lithographies de Rachel Whiteread, qui seront présentées en avant-première chez Karsten Schubert, du 17 avril au 11 mai. L’édition limitée à 35 exemplaires illustre le dynamitage de trois tours de l’East End.

NEW YORK : SOHO OU CHELSEA ?

Le 21 mars, Marianne Bœsky et Patrick Callery inaugurent leur nouvelle galerie, 51 Greene Street, avec une exposition du peintre conceptuel Matthew Abbott. Plusieurs expositions individuelles figurent déjà à leur programme : Melissa McGill, qui signe des installations, et les peintres Lisa Yuskavage, Diti Almoq et Greg Bogin.
 
Arman expose de nouvelles sculptures à partir du 29 mars à la galerie Sidney Janis, qui a depuis peu rallié la 57e Rue Ouest.

La galerie John Weber, à SoHo, accueille Luca Duvoli, un jeune artiste conceptuel italien, et Michelle Charles et Sara Soenowy, deux peintres travaillant à New York.

Jennifer Bartlett dément les rumeurs d’une séparation d’avec Paula Cooper, qui s’installe à Chelsea. Son marchand lui organise au mois de mars quatre expositions en dehors de New York : chez Park Ryu Sook à Séoul, à la galerie Richard Gray à Chicago, chez Harley Baldwin à Aspen et à la Locks Gallery à Philadelphie.

La galerie Marlborough accueille parmi ses artistes le peintre paysagiste anglais Rackstraw Downes et vient de signer avec le sculpteur Tom Otterness.
 
La DCA Gallery expose en permanence des artistes contemporains danois au 420 West Broadway, un haut-lieu de SoHo.
 
Mary Boone ouvrira le 1er mai sa nouvelle galerie, au 745 Cinquième Avenue, avec une exposition de groupe de trois jeunes artistes, Leonardo Drew, Mark Francis et Oliver Herring. La saison prochaine, elle consacrera des expositions individuelles à Eric Fischl et Richard Artschwager, et présentera des nouveaux venus.

Rénovations et déménagements
Le 1er mai également, Sandra Gering quittera Broome Street pour le 504 22e Rue Ouest , où elle conti­nuera de se consacrer à l’"art du futur" dans un brownstone de près de 1 000 m2 reconverti en galeries. C’est le 27 avril que Linda Kirkland y ouvrira sa galerie, au troisième étage : elle prévoit d’exposer principalement des jeunes talents et de confier des projets à des commissaires invités. Jessica Fredericks, qui dirigeait précédemment Jose Freire Fine Art à SoHo, ouvrira, elle, le 23 mars au rez-de-chaussée, et représentera à la fois des artistes débutants et consacrés, parmi lesquels les peintres Eric Wolf et John Wesley.
 
Au 511-525 22e Rue Ouest, un immeuble industriel de six étages, actuellement en travaux, devrait bientôt abriter trois galeries au rez-de-chaussée, les étages étant proposés à des artistes, marchands, collectionneurs et autres acteurs du monde de l’art, comme espaces d’habitation et de travail.
 
Les propriétaires des immeubles à l’angle de la 21e rue, où s’ancrera d’ici peu la galerie de Paula Cooper, devraient eux aussi rénover de nouveaux espaces pour attirer des galeries.

Anthony J.P. Meyer de la galerie Meyer, rue des Beaux-Arts à Paris, présente du 23 mars au 13 avril l’exposition " L’image de l’homme dans l’art océanien ". Elle comprendra des grandes et petites représentations figuratives et sculpturales, ainsi qu’une sélection d’objets ethnographiques dont le décor inclut des éléments du corps humain, par la plupart des groupes culturels océaniens. Parmi les 25 pièces exposées, figureront un monumental personnage Kakame du golfe de Papouasie, un rare ornement de proue Nguzunguzu des Îles Salomon, et un personnage Iniet en pierre, représentant une chauve-souris aux traits anthropomorphes. Les prix iront de 10 000 à 300 000 francs.

Une vingtaine des galeries du Village Suisse présenteront des expositions dans des décors d’époque, du 21 mars au 15 avril. La galerie aux Armes d’antan, par exemple, organise " Les armes de femmes de mœurs légères et de tricheurs au XIXe siècle ", consacrée à des armes à feu de très petit gabarit, souvent richement décorées, tandis que la Boutique écossaise reconstitue " Un décor de salon anglais au XIXe siècle ". La galerie Michel d’Astria mettra en place un décor haute époque, la Maison Han mettra en vedette des personnages en terre cuite chinoises de diverses dynasties.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°23 du 1 mars 1996, avec le titre suivant : Un tour des galeries (II)

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