Sous plis discrets

Bojan Sarcevic au Centre d’art de Brétigny-sur-Orge

Par Olivier Michelon · Le Journal des Arts

Le 24 janvier 2003 - 552 mots

Après de nombreuses invitations à l’étranger, Bojan Sarcevic, jeune artiste travaillant à Paris, bénéficie de sa première monographie dans une institution française. Au Centre d’art de Brétigny, il présente à côté de sculptures et de vidéos récentes une intervention in situ, gageure pour un artiste dont le travail s’appuie sur le maniement des espaces dans lesquels il se produit ou s’expose.

BRÉTIGNY-SUR-ORGE - L’inscription, le plan, les parcours et autres activités topographiques et topologiques sont quelques-unes des figures esquissées dans le travail de Bojan Sarcevic. Ainsi de Miniatures (2002), une vidéo à la première personne où l’artiste trace sur la buée de son pare-brise une hypothétique correspondance plastique abstraite à l’environnement dans lequel il circule en voiture. Le doigt souligne quelques axes du paysage, marque des transitions et reprend le dessin au fil du voyage. Dans ce jeu enfantin et erratique, la forme se décompose alors même que la représentation se précise et sature une surface simultanément humide, chaude et froide. Cette importance donnée au déplacement et surtout à la trace qu’il produit se retrouve dans les notes photographiques de l’artiste, parfois agrandies comme les deux tirages présentés ici : des détails de sol où se remarquent des agencements géométriques, des renvois de formes et différentes strates. Disposées face à face, Spirit of Versatility (2002) et Spirit of Inclusivness (2002) proposent, elles, une réflexion par le biais de la sculpture sur l’ornementation et le motif. La première, comprise dans un angle du plafond, est la réplique grisée de l’élément d’une mosquée, exemple d’une forme géométrique méditative, ouverte et en progression constante. La seconde, reproduction d’un détail de la cathédrale de Cologne, tire aussi son abstraction du répertoire sacré. Plaqué de métaux polychromes qui répondent aux différentes phases de restauration du bâtiment, le volume se dégage de façon massive de l’écrin urbain dans lequel il est habituellement serti. Mies’s leftovers (2002) part, lui, des contours de l’empreinte. Dans une vitrine, l’artiste conjugue ready-made et culture du projet en présentant trois bouts de calques enroulés sur eux-mêmes, soit les rebuts issus de la découpe d’un plan sur une table d’architecte.
Invité par le Centre d’art contemporain de Brétigny pour sa première exposition monographique en France, le jeune artiste a donc rassemblé quelques-unes des œuvres précédemment montrées à l’étranger en les agençant dans un lieu dont le volume se prête mal aux interventions in situ qu’il affectionne habituellement. Difficile à adapter, l’espace est toutefois ici vrillé et chamboulé dans sa longueur par le remodelage de la cimaise principale. Le mur prend forme dans l’espace en étant plié sur le modèle d’une feuille de papier, avec coins, angles et aplats. Amplifiée à cette échelle, la forme pousse évidemment dans ses retranchements les notions d’ornementation pour rejoindre la sphère de l’architecture. C’est d’ailleurs punaisé sur ce même mur que Bojan Sarcevic présente un projet d’intervention sur l’école construite au début des années 1930 par Jean Lurçat à Villejuif. Sur un angle de la façade, ce dernier avait imaginé une fenêtre dont les contours suivent à la trace les trajectoires de la lune et du soleil à une date donnée. Simple comme une utopie.

BOJAN SARCEVIC

Jusqu’au 15 février, Centre d’art contemporain de Brétigny, Espace Jules-Verne, rue Henri-Douard, 91220 Brétigny-sur-Orge, tlj sauf lundi, 14h-18h, mercredi 10h-12h et 14h-18h, samedi 11h-13h et 14h-18h, tél. 01 60 85 20 76, www.sdnf.net

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°163 du 24 janvier 2003, avec le titre suivant : Sous plis discrets

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