Rothschild : une histoire de femmes

Elles étaient aussi discrètes que leur patronyme est mondialement connu. Pendant un siècle et demi, les femmes de la famille Rothschild ont en effet travaillé dans l’ombre à servir une noble cause sans jamais chercher les honneurs. À tel point que les chercheurs ont dû s’armer de patience et de persévérance pour déceler les traces de leur action philanthropique et retisser le récit de leur activité de collectionneuse, de mécène et de donatrice. Activité pourtant prolifique et d’une rare générosité, qui a doté les musées français de milliers d’œuvres d’art toutes périodes confondues. Des primitifs italiens aux masques africains, en passant par les bijoux et les instruments de musique, l’exposition nous offre un aperçu spectaculaire de leur soutien aux arts et aux institutions. Si elles ont toutes reçu la passion de la collection en héritage, chacune a toutefois développé un goût particulier. Certaines ont accompagné les modes, telle Béatrice qui a constitué un fonds remarquable de tableaux et de mobilier du siècle des Lumières. D’autres frappent en revanche par leur audace et leur extravagance qui tranchent avec l’image policée et BCBG de l’illustre famille. On reste ainsi coi devant l’accumulation frénétique de minuscules têtes de mort collectionnées par Mathilde. On demeure tout aussi interloqué devant l’échantillon du fonds hors norme constitué par Alice. Cette dernière avait en effet jeté son dévolu sur un objet utilitaire et traditionnellement masculin : la pipe. Elle en a amoncelé plus de 400 en porcelaine, en céramique, en bois, en ivoire ou en fer. On imagine sans peine l’étonnement de la Ville de Grasse lorsqu’elle s’est vu léguer cette collection atypique. Riche en anecdotes et joliment incarné par une scénographie chaleureuse, l’exposition est un bel hommage à ces bienfaitrices.