\"Ancient Faces\" est non seulement la plus importante des expositions organisées cette année au British Museum, mais également la plus ambitieuse jamais consacrée aux portraits du Fayoum. De nouvelles analyses scientifiques livrent leur lot de révélations tandis que, pour la première fois, des portraits seront exposés à côté des crânes des défunts représentés.
LONDRES - Quelque deux cents portraits du Fayoum sont rassemblés à Londres, soit le cinquième de la totalité des pièces exhumées en Égypte depuis leur découverte à Hawara, en 1888, par l’égyptologue anglais Flinders Petrie. La trentaine de portraits du British Museum est complétée par de nombreux prêts en provenance de musées étrangers, dont le Louvre, le Getty et le Metropolitan. Malheureusement, comme ce fut déjà le cas en 1995 pour l’exposition itinérante "Afrique, l’art d’un continent", aucune des pièces de la riche collection du Musée du Caire n’a été autorisée à sortir d’Égypte en raison des pressions exercées par les groupes nationalistes qui s’opposent à tout prêt d’antiquités à l’étranger.
Pour la première fois, des portraits seront exposés à côté des crânes des défunts représentés. Deux têtes ont même été reconstituées en trois dimensions, celle d’une femme d’une vingtaine d’années et celle d’un homme d’environ quarante ans. Cette comparaison devrait permettre de verser des pièces supplémentaires au débat concernant ces peintures funéraires : visages imaginaires ou premiers portraits humains connus ? Les crânes en question avaient été confiés par Flinders Petrie au Natural History Museum de Londres, où ils ont été récemment retrouvés emballés dans des caisses dans les réserves du sous-sol. Comme nombre de ses contemporains de l’époque victorienne, Petrie s’intéressait essentiellement aux crânes – il demanda d’ailleurs à ce que sa tête, peau et cheveux compris, soit conservée – et laissa de côté la plupart des ossements. Sur les 88 crânes du Natural History Museum, des numéros inscrits au crayon sur plusieurs d’entre eux ont permis de retrouver 19 portraits leur correspondant. Sept de ces portraits sont actuellement au British Museum, les autres se trouvent au Petrie Museum du London’s University College, au Musée du Caire et dans différentes collections américaines et japonaises. Mais les crânes n’ont pas été les seuls à faire l’objet d’un examen.
Les corps embaumés et momifiés dans leurs bandelettes ont été examinés à l’aide de scanners modernes, comparables à ceux utilisés dans les hôpitaux. Grâce à cette technique, il a été possible d’examiner les os sans abîmer les momies et de déterminer leur âge approximatif. Neuf corps embaumés ont été scannés, l’analyse révélant une correspondance étroite entre l’âge des défunts et leur aspect sur les peintures. Cette découverte semble infirmer la théorie selon laquelle les portraits auraient été commandés bien avant la mort de ces personnes afin d’être placés sur leurs momies le jour venu. Cependant, la question de savoir si les peintres ont représenté l’individu lui-même, voire son cadavre, ou si la représentation des défunts est idéalisée, reste entière. "Ce ne sont pas des portraits idéalisés, ce sont des portraits d’individus", considère pour sa part Morris Bierbrier, commissaire de l’exposition.
ANCIENT FACES : PORTRAITS DE MOMIES DE L’ÉGYPTE ROMAINE, jusqu’au 20 juillet, British Museum, Great Russel Street, Londres, tél. 171 636 15 55, tlj 10h-17h, dimanche 14h30-18h. L’expoÂsition sera partiellement reprise au Palazzo Ruspoli, à Rome, au mois d’octobre.
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Rares portraits du Fayoum
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Abonnez-vous dès 1 €Du masque au portrait
Les portraits funéraires du Fayoum sont les seuls survivants de la grande tradition picturale gréco-romaine à base d’encaustique ou à la tempera. Ils allient pratiques funéraires égyptiennes, coutumes des immigrants grecs installés en Égypte et techniques artistiques des conquérants romains. Jusqu’à présent, il était communément admis que ces portraits funéraires – remplaçant l’ancien masque des momies – étaient apparus vers l’an 40 et que leur production s’était poursuivie jusqu’au IVe siècle, mais des études récentes portant sur les vêtements, les bijoux et les types de coiffure représentés, indiquent que les derniers portraits datent de la moitié du IIIe siècle.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°36 du 18 avril 1997, avec le titre suivant : Rares portraits du Fayoum