Le temps est révolu où un journaliste pouvait se demander si Roy Lichtenstein n’était pas « le pire artiste de toute l’Amérique ».
La question était formulée en titre d’un article de Life, en 1964, qui accusait le peintre d’être un copiste. On peut en revanche se demander si l’artiste n’est pas le peintre de la période contemporaine le plus ennuyeux ? En tout cas, il est l’un des plus difficiles à exposer. Car s’il n’est pas un vulgaire copiste, cet ancien GI américain a fondé le principe de son travail sur la copie d’œuvres de Matisse, Picasso, Léger, etc., et sur la répétition d’un procédé : les points Benday, ou points de trame, qui ont fait de sa peinture une marque. Accrocher côte à côte des peintures de Lichtenstein, c’est donc prendre le risque d’assommer le visiteur par un trop-plein de points, de pin-up et de reproductions de Mickey Mouse.
Au Centre Pompidou cependant, il n’en est rien. L’exposition a beau être plus concise que lors de l’étape précédente à la Tate Modern (129 pièces présentées à Paris, contre 176 à Londres), elle est captivante et éloquente. Elle fait le choix d’ouvrir davantage la rétrospective aux différentes pratiques utilisées par Lichtenstein : la peinture y est en bonne place bien sûr, mais jamais au détriment du travail du bronze, de l’estampe ou de la céramique. Ces différents médiums sont d’ailleurs exposés dès la première salle qui prend ainsi le contre-pied de l’accrochage chronologique qui, s’il fonctionne merveilleusement pour Hantaï dans les salles voisines du musée, aurait été ennuyeux. Certaines salles sont à la suite passionnantes, comme celle où le processus de création est décortiqué à l’aide d’études et d’un film qui montrent un processus plus long et plus complexe qu’on l’imagine. L’artiste dessine, recadre, efface, retourne sa toile à l’aide d’un miroir pour voir si la composition fonctionne. La répétition, comme la copie, prend alors tout son sens dans les salles suivantes qui dessinent ainsi les contours d’un artiste théoricien, presque « abstrait » dans sa démarche comme l’avance la commissaire Camille Morineau dans le passionnant catalogue qui accompagne l’exposition, ce qui minimise la présence de toiles tardives assez faibles.
Le risque de monotonie est par ailleurs cassé par la scénographie. Dans un espace plus long que large – pourquoi diable le musée a-t-il réservé ses plus grands espaces à Hantaï qui, s’il est un peintre plus intéressant, déplace moins les foules ? –, un tunnel central scinde l’espace en deux. Ce tunnel lourdement peint en bleu enchâsse les bronzes de l’artiste et les écrase littéralement. Ce qui aurait été disgracieux ailleurs, tempère ici une œuvre sculptée décorative dont l’intérêt plastique est, disons-le, limité.
« Roy Lichtenstein », jusqu’au 4 novembre 2013, Centre Georges Pompidou, 19, rue Beaubourg, Paris-4e, www.centrepompidou.fr
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Pourquoi il faut visiter l’expo Lichtenstein
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°660 du 1 septembre 2013, avec le titre suivant : Pourquoi il faut visiter l’expo Lichtenstein