La sensation de se retrouver au milieu de nulle part est familière en Amérique du Nord tant les espaces sont grands.
Catherine Bédard, commissaire de l’exposition, a choisi trois photographes de Montréal (une île, comme elle tient à le rappeler) dont les séries documentent ou imaginent ce non-lieu qu’est le nulle part. Parmi la cinquantaine d’images rassemblées, on aime particulièrement celles d’Isabelle Hayeur, étranges et étouffantes. Sa dernière série, Underworlds, nous plonge en eaux troubles. L’objectif immergé ne ménage que quelques centimètres d’air, si bien que l’œil est asphyxié devant des paysages solitaires.
Chez Thomas Kneubühler, photographe d’origine suisse, les montagnes sont violemment éclairées pour permettre aux skieurs de s’adonner au plaisir du ski de nuit. Electric Mountains (2009) montre ces pentes iridescentes complètement irréelles sous le feu des projecteurs. L’étrange touche aussi bien les humains dans cette exposition que les paysages. Dans Verre de Pascal Grandmaison, des sujets ont une drôle d’attitude. Présentant une plaque de verre, leurs corps sont conditionnés par ce geste quasiment invisible en raison de la transparence et glissent ainsi vers le bizarre. Ils répondent aux absents de Kneubühler, personnages tellement absorbés dans la contemplation de leur écran d’ordinateur qu’ils semblent vides.
Le nulle part est finalement en chacun de nous, dit poétiquement cette jolie exposition d’un Mois de la photo qui joue les prolongations.
Centre culturel canadien, 5, rue de Constantine, Paris-7e, www.canada-culture.org
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Nulle part est un lieu
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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°654 du 1 février 2013, avec le titre suivant : Nulle part est un lieu