Depuis le temps qu’il n’arrête pas de tisser sa toile de toutes sortes de jeux croisés de lignes ortho- et/ou diagonales, il fallait bien qu’un jour il invite le regardeur à s’y placer en plein cœur.
Voilà qui est fait. Intitulée Seven Corridors, l’œuvre que François Morellet a réalisée dans la grande salle des expositions temporaires du Mac/Val, à Vitry-sur-Seine, est à l’image de la démarche de son auteur : abstraction, rigueur et ludisme en sont les composantes. D’une fidélité sans faille à ses habitudes, l’artiste continue de s’inventer mille et un tours et détours comme s’il voulait vérifier que le système qu’il a mis en place de déclinaisons, de variations et de pirouettes formelles et plastiques est un puits sans fond. Et, de fait, il l’est. Les sept couloirs qu’il dessine ici l’ont été selon le principe qui lui est cher des lignes dites « au hasard », déterminées à partir des lettres de deux alphabets, répartis aléatoirement autour d’un carré. Dans la réalité physique de l’exposition, c’est un peu comme s’il avait non plus tracé son jeu de lignes sur une surface à deux dimensions, mais dans l’espace même, in situ, les développant au sol, en volume et sur les murs. Il en résulte un véritable labyrinthe à plafond ouvert à l’intérieur duquel le visiteur est amené à déambuler et qui l’amène à vivre « un » Morellet du dedans. Une première qui mêle joyeusement perception phénoménologique et jeu de cache-cache, mais, surtout, qui témoigne de la vivifiante imagination d’un artiste dans sa quatre-vingt-dixième année. « Les œuvres d’art sont des coins à pique-nique, des auberges espagnoles où l’on consomme ce que l’on apporte soi-même », affirme François Morellet. Entendons-le : il n’est d’œuvre digne de ce nom que celle qui est ouverte à l’imaginaire de l’autre. Seven Corridors est propice aux courants d’air et à une circulation résolument libre. À chacun d’en faire usage à son gré. Paradoxe : c’est bien le seul labyrinthe où l’on ne se perd pas, mais où l’on se retrouve !
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Morellet, des couloirs labyrinthiques
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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°685 du 1 décembre 2015, avec le titre suivant : Morellet, des couloirs labyrinthiques