Rien d’aussi peu ostentatoire qu’une exposition de peintures de Giorgio Morandi (1890-1964). Toutes les toiles sont petites, voire très petites.
Au premier regard, les couleurs paraissent ternes – les gris-bleu pâle côtoient les vert clair, les ocre-gris et les bruns –, et les sujets ne sont pas particulièrement attrayants : vases, bouteilles, brocs, lampes à huile, récipients et boîtes disposés côte à côte forment de discrètes natures mortes, d’une présence si pâle, si ténue, qu’elles ne se donnent aucune chance de retenir l’attention d’un regard peu attentif. Les tons délavés des formes sommairement suggérées des bouquets de fleurs ne sont guère plus aguicheurs, tout comme les paysages discrets de ce « travailleur inlassable et scrupuleusement infécond » (André Fermigier).
Heureusement pour la postérité de l’artiste, ce jugement sommaire est loin de faire l’unanimité. Les sobres natures mortes et les austères paysages de Morandi comptent de nombreux et fervents admirateurs, dont beaucoup d’artistes pour lesquels ce peintre est une figure particulièrement respectée. Son art discret et subtil, intuitif et cérébral, immédiatement perceptible et insaisissable, fascine par son apparente modestie. Comme si Morandi n’avait qu’un objectif : rendre compte de la réalité avec la plus grande économie de moyens possible.
Né à Bologne, il quittera rarement sa ville natale. À vingt ans, il s’installe avec sa mère et ses trois sœurs insti-tutrices dans un appartement via Fondazza. Il ne déménagera qu’une fois, avec mère et sœurs, pour un autre appartement sur cour dans le même immeuble. Très tôt en contact avec les Futuristes, il participe à la première « Exposition libre futuriste » à Rome en 1914.
Il rencontre en 1919 Giorgio De Chirico et Carlo Carrà. C’est donc un artiste fin connaisseur des avant-gardes italiennes en ce début de xxe siècle, et fortement impressionné par l’œuvre de Cézanne, qui décide de « simplement » peindre les objets qu’il dispose avec soin dans la petite pièce qui lui sert d’atelier. Giorgio Morandi, un peintre intellectuel ? « Il est vrai que j’estime que rien ne peut nous paraître plus irréel ou abstrait que ce que nous voyons de nos propres yeux. »
« Giorgio Morandi, L’abstraction du réel », Hôtel des Arts, 236, boulevard du Général-Leclerc, Toulon (83), www.hdatoulon.fr, jusqu’au 26 septembre 2010.
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Morandi, « Scrupuleusement infécond »
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°627 du 1 septembre 2010, avec le titre suivant : Morandi, « Scrupuleusement infécond »