« Une exposition, c’est avant tout un plaisir physique du lieu », rappelle Marc Pataut quand on l’interroge sur la manière dont il a envisagé cette exposition, la première d’une telle ampleur en France.
Tout y concourt dans son approche des espaces du rez-de-chaussée du Jeu de paume : l’absence de cloisons, les différents formats des photos tapissant ou non les murs, la forme spécifique donnée à chaque projet et la manière de photographier de face un visage, un corps, à commencer par le sien. Le travail avec les enfants de l’hôpital de jour d’Aubervilliers en 1980-1981 a été « un moment fondateur dans mon travail », souligne-t-il. « J’ai compris que la photographie est aussi un rapport de corps. Il ne s’agit pas de figer celui ou celle que l’on photographie dans l’identité sociale qui lui est donnée par la société, mais de travailler avec elle afin qu’elle se mobilise pour porter son portrait et le donner à voir aux autres. » Pas une série qui n’échappe à cette conception, ni au besoin de s’inscrire dans un temps long ou de vivre parfois aux côtés de ceux qu’il photographie. Son travail sur un territoire précis, comme celui sur le terrain vague du futur stade de France à Saint-Denis, n’y déroge pas. De la même manière qu’aucune série ne déroge au passage de Marc Pataut dans l’atelier d’Étienne Martin aux Beaux-Arts de Paris. « Un modèle posait pendant trois semaines ; on travaillait avec la terre, la lumière, on cherchait. Je fais la même chose en photographie », dit-il dans le catalogue aux éditions Filigranes. L’articulation de ces travaux avec les deux séries réalisées sur son propre corps (dont Mon Corps, série inédite) est on ne peut plus éloquente à ce propos.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°726 du 1 septembre 2019, avec le titre suivant : L’humanité de Marc Pataut