Même si Antonio Saura s’en défend, son œuvre semble tout de même très liée à sa vie et à son expérience du monde. Elle est effectivement envahie de thèmes propres à la culture visuelle et à l’histoire de son pays, l’Espagne.
Deux évènements marquèrent l’artiste dans sa jeunesse : la vision tragique d’un homme qui s’écroule, la tête sectionnée par une rafale durant la guerre civile, et ses cinq années de solitude et d’immobilité causées par une grave maladie pendant son adolescence. Après une courte période surréaliste et un séjour à Paris, Saura retourne à Madrid et fonde le groupe « El Paso », réunion de jeunes artistes espagnols en opposition avec la société franquiste et à la recherche d’une esthétique informelle. L’art de Saura retranscrit les souffrances humaines par des déformations et une iconographie monstrueuse et violente. Ses thèmes privilégiés sont les portraits, la foule, les crucifixions qui ne sont traités qu’en noir, blanc et brun. Avec déférence et un brin d’ironie, il fait référence à la peinture ancienne : les chiens d’après Goya, les portraits de Philippe II d’après Vélasquez ou Dora Maar d’après Picasso. De manière obsessionnelle, Saura fait apparaître des têtes simultanément construites et éclatées en conservant des espaces vides sur la toile, favorisant ainsi l’atmosphère dramatique et une tension propre à sa peinture. En réalisant des cadres monumentaux, conçus pour cette exposition, le musée Jenisch cherche à restituer la force inhérente à son travail. Outre un ensemble important de peintures, s’ajoutent des oeuvres sur papier, des dessins et surtout la presque totalité de ses grands livres illustrés.
VEVEY, Musée Jenisch, jusqu’au 30 août.
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Les obsessions de Saura
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°498 du 1 juillet 1998, avec le titre suivant : Les obsessions de Saura