Les Amériques confrontées

La peinture, la photographie, la littérature et plus tard le cinéma ont célébré la grandeur de cette nature qui distinguait le jeune pays de son tuteur européen. Le genre paysager est, depuis lors, resté un genre privilégié, vecteur d’un idéal, d’une puissance proprement américaine et profondément politique. De l’autre côté du spectre artistique, au terme des années 1960, émergent les hyperréalistes et leur peinture lisse, mettant en crise la relation entre la réalité et l’image en représentant des vitrines, des centres urbains, des chromes de voiture… L’exposition prend le pari de mettre en dialogue des œuvres de ce mouvement avec des photographies qui ont été contemporaines de son émergence et à l’origine d’un séisme idéologique dans l’histoire du paysage américain : l’exposition « New Topographics » (1975). Elle généra une esthétique nouvelle délaissant le lyrisme moderniste des chantres du genre comme Ansel Adams, pour donner un visage réaliste à l’Amérique dans un style documentaire frontal jusque-là peu prisé. Les photographies représentant la banlieue et des zones urbaines sans fantasme, images de format modeste presque réticentes à toute éloquence, rencontrent ainsi pour la première fois les toiles impressionnantes à la précision redoutable des hyperréalistes. C’est une relecture osée d’une histoire d’une même Amérique, un croisement peu fréquent entre un mouvement pictural et une généalogie photographique que consacre avec audace la Kunsthaus de Graz.