Nonobstant le très faible nombre de peintures de la main de Léonard de Vinci connues (une quinzaine), pas moins de quatre mille planches de dessins et manuscrits lui sont en revanche attribuées. Une source d’autant plus intarissable pour la recherche que ces œuvres sur papier, éparpillées à travers le monde dans des collections publiques et privées, dorment la plupart du temps dans des cartons hermétiques à la lumière. La réunion de cent vingt dessins de Léonard au Metropolitan Museum of Art de New York, qui n’en compte pas plus de six dans ses collections, est déjà en soi un tour de force. Jamais autant d’œuvres sur papier de Léonard n’avaient été regroupées aux États-Unis. Cette exposition est donc d’autant plus remarquable qu’elle joue sur deux registres. Celui d’un grand succès populaire, car le seul nom de Léonard de Vinci suffit à déplacer les foules (il n’est qu’à visiter le Met un week-end pour s’en convaincre), et celui d’une exposition qui offre aux historiens de l’art de nouvelles perspectives sur l’œuvre du maître, tant la confrontation d’autant de ses dessins en un même lieu est rare. Purement chronologique, le parcours inclut en prologue neuf dessins de Verrocchio, auprès duquel Léonard fit son apprentissage à Florence, et s’achève sur la postérité de son œuvre, avec des dessins de quelques-uns de ses élèves et suiveurs (Boltraffio, Melzi et Luini notamment). Aussi le choix des commissaires a-t-il été de ne pas s’attacher à un seul aspect de l’œuvre dessiné de Léonard, mais à toutes ses facettes. Les études anatomiques et la cartographie, les grotesques et la botanique, ou encore les machines et les écrits sont ici mis en regard, permettant d’approcher le travail de Léonard de Vinci dans son ensemble, sans qu’il soit possible de dissocier l’œuvre de l’artiste de celles du scientifique et du théoricien. Car, si Léonard a si peu peint et surtout laissé tant de toiles inachevées, c’est qu’il s’abîmait en d’incessantes recherches, multipliant les esquisses et les repentirs, les essais et les observations. Si nombre de mystères restent attachés à l’œuvre de Léonard de Vinci, cette exposition confirme l’attribution de certains dessins jugés douteux auparavant, apporte de nouvelles propositions de datations et dissipe quelques contrevérités. Il apparaît notamment que le sfumato, dont on attribue généralement l’invention à Léonard, est déjà présent dans les rares dessins de Verrocchio. À n’en pas douter, cette exposition et son catalogue de 786 pages, auquel ont contribué huit universitaires, resteront dans les annales. Quelques mois avant une autre exposition réunissant presque autant de dessins et manuscrits de Léonard de Vinci au Louvre (du 9 mai au 14 juillet), la voie est ouverte à un nouveau regard sur son œuvre.
NEW YORK, The Metropolitan Museum of Art, 1000 Fifth Avenue, tél. 00 (1) 212 535 7710, 22 janvier-30 mars.
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Léonard au grand jour
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°545 du 1 mars 2003, avec le titre suivant : Léonard au grand jour