« Ce que l’on peut exiger d’une image d’architecture, c’est de traduire, en même temps que l’émotion ressentie devant elle, les raisons mêmes de cette émotion », disait Lucien Hervé.
Cette assertion, le photographe de Le Corbusier, collaborateur de bien d’autres architectes de renom, l’a fait sienne de bout en bout de sa carrière, mais à sa façon. Dix ans après le décès de Lucien Hervé, Imola Gebauer le raconte à partir du travail inédit qu’elle a mené dans ses archives. L’historienne de l’art a été la collaboratrice du photographe dans les années 2000. Le volume conséquent de tirages (plus de cent soixante, dont un certain nombre jamais montrés), et le découpage par thèmes construisent un récit étayé sur la perception de Lucien Hervé de l’architecture moderne, sacrée ou ancienne. La recherche des formes géométriques et des contrastes pose les jalons d’une démarche que les photographies du début assoient dès 1939. La dialectique des lignes et des formes contenues dans un fragment domine par la suite. « C’est dans le détail que l’architecture prend forme », disait le photographe, peintre à ses débuts et toute sa vie plus intéressé par les peintres que par les photographes. Exprimer le maximum avec le minimum a été le leitmotiv du photographe, et la rigueur son maître-mot. Malheureusement, à trop vouloir respecter l’esprit du photographe, l’accrochage renforce trop rigueur. L’homme, sa grande humanité, peuvent échapper si l’on ne prend pas le temps de visionner les deux films projetés dans l’exposition.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°711 du 1 avril 2018, avec le titre suivant : Le langage des formes de Lucien Hervé