Cette présentation impressionnante de l’œuvre de Vlaminck, à l’Atelier Grognard à Rueil-Malmaison, aurait gagné à être plus sélective.
RUEIL-MALMAISON - C’est une bonne surprise. L’Atelier Grognard à Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine), peu connu du grand public, a réussi à réunir plus de cent tableaux de Maurice de Vlaminck (1876-1958) – l’ensemble prenant l’allure d’une mini-rétrospective. Certes, le lieu n’est pas très séduisant et toutes les toiles ne sont pas de qualité égale. Il n’en reste pas moins que le parcours est riche et offre un aperçu intéressant de la production picturale de celui qui, avec Matisse et Derain, participe à l’aventure du fauvisme.
Le prétexte de cette manifestation est biographique : Vlaminck a vécu sur place entre 1902 et 1914. C’est peut-être plus qu’un détail anecdotique car, à la différence des autres artistes fauves, il n’explore pas la lumière du Midi mais se concentre sur les paysages familiers des banlieues de l’Ouest parisien : Chatou, Bougival, Le Pecq… Question de goût ou prolongement de la tradition impressionniste ? Le choix est également lié à la thématique populaire caractéristique des débuts de son œuvre (cabarets, bistrots, prostituées).
« Populaire », le terme correspond parfaitement à l’image, vraie ou inventée, que Vlaminck cherche à donner de lui-même. Autodidacte et fier de l’être, l’homme se veut à l’écart de toute théorie artistique, voire à l’écart de la culture. À l’entendre, sa pratique est directe et spontanée : « Quand j’ai de la couleur dans les mains, la peinture des autres je m’en fous : la vie et moi, moi et la vie. » Les deux autoportraits qui ouvrent la manifestation vont dans le même sens ; tout ici dégage une personnalité puissante et imperturbable.
C’est la nature, le thème privilégié de Vlaminck, qui se trouve au cœur de l’exposition. Les deux premières toiles, Les Châtaigniers à Chatou et Le Restaurant de la Machine à Bougival, toutes deux de 1905, l’année du fameux Salon d’automne à Paris, sont traitées avec une technique très personnelle : la touche épaisse et emportée, plus ou moins régulière, posée en tourbillon, s’inspire des représentations mouvementées de Van Gogh, artiste qu’il admire. La gamme chromatique saturée, lumineuse et éclatante, devient le signe de reconnaissance des fauves. Cherchant le contraste le plus puissant entre les tonalités, Vlaminck, à la différence de Derain ou de Matisse, s’intéresse peu à la destruction de l’espace illusionniste ou à la dissolution des formes.
Avec les paysages urbains, l’approche, inspirée par Cézanne, est plus géométrique et la gamme de couleurs plus froide. Généralement, à partir des années 1920, la palette chez Vlaminck devient plus sombre et les formes plus tourmentées. Ce sont surtout les marines, écrasées par les ciels d’orage et agitées par la tempête, qui illustrent ce changement. Ainsi, son œuvre tardive s’approche de l’expressionnisme, parfois marqué d’un pathos excessif. De même, les natures mortes assemblées dans une salle séparée, où l’on trouve à boire et à manger, laissent dubitatif. En d’autres termes, en dépit des mérites de l’exposition, on aurait souhaité un tri plus rigoureux des œuvres.
Commissaires : Véronique Alemany, conservatrice du patrimoine ; Colette Bal-Parisot, directrice de l’Atelier Grognard
Nombre d’œuvres : 105
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Le fauve des banlieues
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Abonnez-vous dès 1 €Jusqu’au 25 mai 2015, Atelier Grognard, 6, av. du Château-de-Malmaison, 92500 Rueil-Malmaison
tél. 01 47 14 11 63
www.mairie-rueilmalmaison.fr
tlj 13h30-18h, entrée 6 €.
Légende photo
Maurice de Vlaminck, Le Restaurant de la machine à Bougival, 1905, huile sur toile, 60 x 81,5 cm, Musée d'Orsay, Paris. © Photo : RMN/Hervé Lewandowski
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°431 du 13 mars 2015, avec le titre suivant : Le fauve des banlieues