Les Gobelins exposent pour la première fois l’intégralité de la tenture de « L’Histoire d’Alexandre » Le Grand.
PARIS - Pour sa troisième exposition temporaire dans la Galerie des Gobelins rénovée, le Mobilier national poursuit à Paris sa politique de mise en valeur des chefs-d’œuvre conservés dans ses réserves. Après le designer Pierre Paulin, c’est toutefois à un retour aux sources qu’est cette fois-ci convié le visiteur, avec la présentation d’un magistral ensemble de tapisseries du XVIIe siècle. Créée en 1662 par Colbert pour soutenir la production française, la manufacture est placée dès son ouverture sous la direction de Charles Le Brun (1619-1690). Le peintre du roi y est chargé d’assurer l’unité des productions du « Grand Siècle », dont l’atmosphère est restituée au premier niveau de l’exposition dans une scénographie rouge grenat signée du décorateur Jacques Garcia. La présentation s’ouvre par trois des quatre pièces de la tenture du Passage du Rhin, illustration parfaite de la qualité technique et des choix iconographiques des Gobelins. Peintes sur soie, ce qui leur confère une étonnante tonalité pastel, ces pièces relatent un épisode fameux de la guerre de Hollande, l’attaque des Provinces-Unies en 1672. Ces soieries témoignent aussi de la division du travail pratiquée aux Gobelins : scènes de guerre exécutées d’après des cartons de Adam-Frans Van der Meulen (1632-1690), peintre des batailles du roi, et bordures florales dues à Jean-Baptiste Monnoyer (1634-1699).
Tout le faste des productions des Gobelins est ensuite déployé à l’étage de la galerie, avec la présentation de l’intégralité de la tenture de L’Histoire d’Alexandre Le Grand, soit onze tapisseries qui n’avaient pas été réunies depuis l’Ancien Régime. Conçu par Le Brun de 1660 à 1673, l’ensemble a été tissé huit fois de 1664 à 1688, en haute et basse lisse, puis reproduit à Bruxelles ou Aubusson. S’inspirant de Giulio Romano, Le Brun y livre une composition historique magistrale, emprunte de tumulte et ponctuée de devises latines, inscrivant Louis XIV dans la lignée du roi de Macédoine. Le Louvre conserve plus de deux cents dessins préparatoires, dont le célèbre visage du Perse fuyant tiré de La Bataille d’Arbèles, utilisé par le peintre lors de sa célèbre conférence sur l’expression des passions, en 1668. Comme le rappelle le catalogue, l’étude de ces tapisseries et surtout de ces cartons préparatoires reste néanmoins toujours à écrire. L’exposition a pourtant suscité quelques découvertes. « Sous le règne de Louis XIV, nous n’avons aucune trace d’une utilisation en intérieur, explique Jean Vittet, commissaire de l’exposition. En revanche, nous savons que la tenture a été exposée sur les façades extérieures du château [de Versailles], en 1677, lors de la Fête-Dieu ». D’où cet alignement assez déconcertant, en guise de scénographie, de topiaires en plastique taillées à la française.
ALEXANDRE ET LOUIS XIV – TISSAGES DE GLOIRE, jusqu’au 1er mars 2009, Mobilier national – Galerie des Gobelins, 42, av. des Gobelins, 75013 Paris, tél. 01 44 08 53 49, tlj sauf lundi 12h30-18h30. Cat. La tenture de l’histoire d’Alexandre le Grand, éd. RMN, 112 p., 28 euros, ISBN 978-2-7118-5528-5.
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Le Brun à l’honneur
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Abonnez-vous dès 1 €- Commissaire : Jean Vittet, inspecteur de la création artistique au Mobilier national
- Scénographie : Jacques Garcia, décorateur
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°288 du 3 octobre 2008, avec le titre suivant : Le Brun à l’honneur