La planète selon Noémie Goudal

La monographie que signe Laure Forlay, chargée des expositions au Frac Auvergne, est particulièrement éloquente à ce propos dans son choix d’œuvres. À partir d’une montagne, d’une roche, d’une forêt ou de l’intérieur d’une grotte, et de travaux scientifiques à leur sujet, Noémie Goudal construit une image ou une vidéo qui réinterroge leur construction au cours du temps. L’évolution de la silhouette d’une falaise en bordure de mer sur des millions d’années se visualise ainsi au fil de plus d’une centaine de tirages noir et blanc alignés sur deux murs, de sorte que, d’une ligne à une autre, on suit l’érosion progressive de la roche qu’elle recrée par un tour de passe-passe à la prise de vue. Ailleurs, c’est une vidéo de 8 minutes en boucle,Inhale, Exhale, qui transporte dans un sous-bois, au pied d’un marécage. L’artiste y fait émerger lentement deux imposants décors de végétaux tropicaux, transformant le paysage, avant que celui-ci ne retrouve sa physionomie d’origine au fur et à mesure de leur replongée. On se prend au jeu de son art de la prestidigitation, du trompe-l’œil. Noémie Goudal reconfigure et réactive sans jamais se répéter les formations des reliefs et des forêts dans un étonnant jeu de déconstruction-reconstruction et de télescopages de formes ou de végétaux. D’une œuvre à une autre, elle crée de nouvelles formes tout en ne cessant de questionner, par métaphore, les bouleversements induits par le changement climatique. Comme dans Origins, nouvelle série dévoilée au Frac Auvergne, où à partir de découvertes en paléoclimatologie, l’artiste a conçu des images d’espèces végétales qui ont l’air de prélèvements prêts à être étudiés dans les terrariums d’un musée d’histoire naturelle. Car chez Noémie Goudal, derrière la beauté d’un paysage ou d’une plante, se cristallise une histoire de sédimentations et de chaos climatiques qu’elle réinterprète.