La Maison rouge, agitatrice d’idées !

Face aux sept cents œuvres et documents rassemblés (journaux, tracts, affiches, disques, films, émissions de télé…), qui retracent l’aventure de deux décennies marquées par la « pensée 68 », le pas de côté et le goût des marges, impossible de ne pas penser au massacre de Charlie Hebdo, qui est présent bien sûr, et de ne pas se dire, que, à coups de retour à l’ordre, d’obscurantisme religieux et d’autocensure actuels, on a perdu bien du terrain depuis. Aussi, ce n’est pas sans plaisir, et sans une certaine nostalgie, qu’on se replonge dans ces années-là, de Mai 68 à la chute du mur de Berlin en 1989, avec l’espoir, comme le soulignent les deux commissaires de l’exposition, Guillaume Désanges et François Piron, « de réactiver certaines énergies au présent ». Conçu en onze sections, le parcours dresse le portrait d’un esprit rebelle qui, face aux valeurs patriarcales dominantes, oppose un mouvement contestataire interrogeant les identités sexuelles et les fondements de la société : « C’est par ses marges, notent les commissaires, que la France a produit ce qu’elle a de meilleur. » Si l’art est bien représenté (de Pierre Klossowski à Claude Lévêque, en passant par Michel Journiac), les cultures populaires et alternatives sont aussi présentes (Bazooka, Bérurier Noir, Carbone 14, Gainsbourg…) et, franchement, de ce maillage foisonnant, brassant histoire de l’art et histoire des idées, émerge une vivifiante histoire de France qui apporte un grand bol d’air aux visiteurs.