La confrérie des peintres-poètes

Le thème central reste inchangé, mais cette dernière variation permise par l’apport d’œuvres privées encore jamais vues offre un regard inédit sur ces artistes honorés hier, oubliés aujourd’hui. Il faut donc saluer ce regain d’intérêt. Tous membres de la Société nouvelle de peintres et sculpteurs, entre 1895 et la veille de la Seconde Guerre mondiale, ils emportent les suffrages de la critique et bénéficient d’une vaste clientèle. Que ce soit les portraits d’Edmond Aman-Jan, les paysages d’Henri Le Sidaner, les scènes de plage de René-Xavier Prinet, voire les allégories de Gaston La Touche, une approche faite de sentimentalité et de mystère les réunit. Parisiens, provinciaux, étrangers comme Frits Thaulow ou Émile Claus, chacun gardant un style que le visiteur identifie peu à peu, ils se rejoignent sur un point : leur attachement à « la poésie latente des choses », selon le mot de Camille Mauclair. Moins impressionnistes que symbolistes et pointillistes, ces artistes voient d’abord dans le motif une ouverture au rêve. Parcourir ces six sections, c’est prendre plaisir à détailler cette centaine de tableaux bien composés et évocateurs, à admirer les nuances des touches ou les jeux d’ombres, à vivre un moment en compagnie de Marcel Proust. Devenus soudain de « vulgaires académiques », ces témoins de l’ambiance Belle Époque et des Années folles seront balayés par la déferlante de la modernité.