RUEIL-MALMAISON - « Un seul être vous manque et tout est dépeuplé… » Lorsque Paul Gauguin quitte pour de bon le petit village breton de Pont-Aven pour la Polynésie en 1894, le semblant d’école qu’il laisse derrière lui est aussitôt atomisé. Car le peintre ne s’est jamais fait professeur, il s’est seulement évertué à faire respirer les esprits, à libérer les vocations. Dont acte.
La nouvelle exposition de l’Atelier Grognard s’intéresse à ce moment charnière, cette période de quelques années au cours desquelles le creuset d’une avant-garde dévouée au synthétisme fut témoin d’une multiplication des styles et des talents plus ou moins grands.
Destins inégaux
« L’éparpillement a immanquablement des conséquences sur l’évolution de leur style. L’école devient buissonnière », résume Hervé Duval, commissaire de l’exposition. Si l’on peut compter sur les recherches de Paul Sérusier et de Maurice Denis pour franchir de nouvelles limites plastiques, le résultat n’est par ailleurs pas toujours probant… Entre un Ferdinand Loyen du Puigaudeau qui revient au postimpressionnisme et s’approprie la Bretagne des paysages et des traditions, et un Maxime Maufra versatile qui ne sait sur quel pinceau danser, la seconde partie de l’exposition donne les preuves d’un individualisme forcené. La Bretagne y est déclinée sous toutes ses formes – si elle est l’élément fédérateur de tous les peintres qui y sont restés, elle n’est plus l’objet d’une émulation artistique bien définie.
Dans cet exercice qui s’évertue (et parvient) à être didactique, aussi bien au fil du parcours de l’exposition que dans le catalogue qui l’accompagne, la surprise naît à la rencontre de tableaux méconnus (La Cueillette de pommes de Paul Sérusier, 1898), de précieux petits formats aux faux airs d’icône (Les Toits rouges [1892] de Maurice Denis ; Sainte en prière [1893-1894] de Charles Filiger ; Bretonnes au bord de la mer [1887] d’Émile Bernard), et de peintres étrangers (Marine aux rochers rouges [1898] de l’Irlandais Roderic O’Conor). Fort de ses relations avec le marché de l’art breton et parisien, le commissaire – et galeriste à Quiberon – Hervé Duval est parvenu à rassembler un corpus tout à fait honorable d’œuvres provenant de collections particulières – l’Atelier Grognard est un espace d’exposition sans collection propre.
Jusqu’au 8 avril, Atelier Grognard, 6, avenue du Château de Malmaison, 92500 Rueil-Malmaison, tél. 01 41 39 06 96, www.mairie-rueilmalmaison.fr, tlj 13h30-19h.
Catalogue, éditions du Valhermeil (Colombelles), 128 p., 19 €
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La Bretagne à Rueil
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°384 du 1 février 2013, avec le titre suivant : La Bretagne à Rueil