Hamish Fulton, l’artiste arpenteur

Souvent associé au Land Art, il s’en démarque pour autant, car il n’intervient pas sur le paysage. Son art relève plutôt de l’expérience physique et mentale et d’une pratique conceptuelle. Depuis le début des années 1970, Fulton restitue ses longues randonnées en Europe, en Amérique, Asie et Australie par des photographies associées à du texte, des dessins, aquarelles, sculptures ou des coupes topographiques. Ces diverses traces relèvent souvent de mesures de la marche (nombre de jours, distance parcourue, altitude franchie…) et de leurs conditions (météo, assistance logistique, rencontres, etc.). L’accumulation des chiffres permet d’évaluer l’engagement de l’artiste au cours des années, les efforts physiques nécessaires qui rapprochent ses expéditions de celles d’alpinistes chevronnés. Par une scénographie qui joue sur le rapport à l’espace, et les différences d’échelle entre des œuvres très monumentales et d’autres plus intimes, l’exposition donne à voir le souffle épique de la démarche de Fulton. Le volume imposant de la salle du sous-sol est ici parfaitement révélé par de gigantesques peintures murales de plusieurs mètres de longueur. L’une d’elles retrace deux marches similaires de 21 jours dans le parc national du Mercantour effectuées à onze ans d’intervalle (2011/2022). Elles sont résumées sous la forme de deux grandes lignes brisées, qui témoignent des différences d’altitude franchies. Si les peintures murales relèvent d’un graphisme minimaliste et volontiers militant, les aquarelles, photos et sculptures regroupées fonctionnent comme des installations sensibles et inspirées. On pourra compléter cette visite par une deuxième exposition au Centre d’art du Cairn de Digne-les-Bains, « Tibetan Kora ». Autour de trois marches dans l’Himalaya (2000, 2007 et 2011) et d’un ensemble d’œuvres évoquant la situation politique au Tibet, cette dernière exposition participe de l’engagement militant d’Hamish Fulton.