Art contemporain

Cannes (06)

Gregory Forstner, dérangeant mais essentiel

Le Suquet des artistes - Jusqu’au 5 décembre 2021

Par Vincent Delaury · L'ŒIL

Le 22 septembre 2021 - 273 mots

CANNES

Avec la rétrospective « Le Soleil brûlant sous les paupières fermées », sous le commissariat de Numa Hambursin et d’Hanna Baudet, le Suquet des artistes offre un large panorama de la peinture rageuse, réalisée à larges coups de brosse, de Gregory Forstner, peintre franco-autrichien né à Douala (Cameroun) en 1975.

Réunissant une cinquantaine de pièces significatives (peintures et dessins) de son aventure artistique, mêlant mythologie personnelle, autobiographie – il est le petit-fils d’un officier SS autrichien, nazi convaincu – et mythes collectifs, le parcours décliné en trois temps forts dévoile, dans la première salle, ce que l’on connaît habituellement de lui, à savoir un théâtre haut en couleurs criardes constitué de chiens et de cochons témoignant, entre farce et tragédie, de la comédie humaine. Dans la deuxième salle, le visiteur fait face à des figures noires, réalisées à New York, représentées par des Blancs, à travers lesquelles l’artiste dénonce les travers d’une société américaine conservatrice aux relents de racisme encore manifestes. Enfin, dans le tout dernier espace, via une succession d’alcôves plongées dans l’obscurité, des hôtesses de l’air libertines et masquées se dévoilent aux regards, peintures à sous-entendu érotique autant qu’historique – comment ne pas penser aux gueules cassées de la Première Guerre mondiale ? Particulièrement dérangeant, l’art expressionniste de Gregory Forstner avance masqué. En dissimulant, via une pléiade de cabots jouant toujours les mêmes rôles au sein d’un cirque pictural burlesque, l’artiste a le pouvoir, à l’instar du masque, de révéler ce qu’il cache : les travers des hommes. En ce sens, cette peinture audacieuse parce qu’ambiguë, cachant comme Démocrite sa profonde mélancolie derrière un rire de façade, s’avère essentielle pour notre temps présent.

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°747 du 1 octobre 2021, avec le titre suivant : Gregory Forstner, dérangeant mais essentiel

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