« En dehors d’un petit cercle d’artistes et d’amateurs, Georges Michel était peu connu jusqu’ici, et nous ne pouvons qu’applaudir à une tentative destinée à faire sortir de l’oubli un nom qui a droit à l’estime de tous les amis de l’art. »
Ce constat n’est pas celui d’un observateur contemporain, mais celui d’un chroniqueur de 1873. Il est toutefois encore diablement d’actualité, tant la fortune critique de Georges Michel (1763-1843) est paradoxale. Du Havre à Toulon en passant par Strasbourg, Brest et évidemment Paris, l’artiste est ainsi on ne peut mieux représenté dans les collections françaises. Et pourtant, son œuvre demeure fort mal connue. Au mieux, on ne le cite que pour évoquer d’autres artistes dont il a été précurseur, mais nettement plus célèbres que lui, comme l’école de Barbizon et, bien sûr, Van Gogh, qui voyait en lui un « maître ». Plus d’un demi-siècle après sa dernière exposition personnelle, il était donc plus que temps de donner enfin à ce « Ruisdael de Montmartre » la place qui lui revient.
Prenant la suite du monastère royal de Brou, la Fondation Custodia fait le point sur la carrière de Michel, et démêle notamment le vrai du faux dans sa biographie officielle, hélas peu fiable, et son corpus noyauté par des copies. Les collections françaises, publiques et privées, ont donc été passées au crible pour dresser un superbe panorama de son œuvre à travers quatre-vingts peintures et dessins déclinant une époustouflante gamme de paysages franciliens nourris de références au Siècle d’or.
La palette de Michel va en effet du paysage pittoresque aux vues sublimes mettant en scène des éléments déchaînés, des ciels menaçants et des effets de lumière dramatiques. Cette facette de son travail mérite à elle seule la visite. Elle rassemble en effet des pépites d’une étonnante modernité comme le Paysage orageux conservé à Lyon ou le Violent Orage prêté par Rotterdam. La résurrection de ce grand paysagiste est assurément l’une des plus belles surprises de ce début d’année.
« Georges Michel. Le paysage sublime »,
Fondation Custodiaf / Collection Frits Lugt, 121, rue de Lille, Paris-7e, www.fondationcustodia.fr
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°710 du 1 mars 2018, avec le titre suivant : Georges Michel : résurrection d’un grand paysagiste