Dans les 12 images de Gàbor Ösz – exposé pour la première fois en France – qui recensent un paysage balnéaire monotone, il y a toujours la mer, laiteuse et sans vagues, et le ciel, sans nuages mais voilé. Rien d’autre, simplement une étrange absence. Le regard d’un des quelque 15 000 bunkers qui jalonnent la côte de la Norvège au Pays basque et constituent la ligne de défense du Mur de l’Atlantique. Ces modules de béton font aujourd’hui partie du paysage de bien des vacanciers : jadis postes de surveillance menaçants, ils sont devenus tour à tour d’inoffensifs terrains de jeux, des ruines historiques fantomatiques et aussi un appareil photo pour le jeune artiste hongrois. Il applique à ces espaces le principe de la chambre obscure : en obturant presque entièrement la meurtrière horizontale des blockhaus pour ne laisser la place qu’à un œilleton, il permet à une feuille de papier photo-sensible d’enregistrer le point de vue du bâtiment sur une durée de plusieurs heures.
Ce procédé « porte en soi les phénomènes conjugués de l’observation et de la réalisation d’une image », écrit l’artiste. Cet enregistrement unique du temps gomme alors tout changement climatologique, toute intrusion animale ou humaine. La révélation floue et imprécise de ce « regard » joue alors sur plusieurs registres, curieusement intemporel dans le rendu et tellement lié au temps d’une longue attente, comparable à celle d’un tour de guet, dans l’action photographique. A la fois tourné vers la mémoire d’un conflit avec l’utilisation originale de ces sentinelles abandonnées,
la démarche de Gàbor Ösz révèle aussi bien les phénomènes liés à la perception que ceux de l’apparition d’une image.
- TOURS, Centre de Création contemporaine, 55, rue Marcel Tribut, tél. 02 47 66 50 00, 23 juin-16 septembre.
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°528 du 1 juillet 2001, avec le titre suivant : Garde à vue