La Fondation Magnani Rocca présente dans la villa-musée de Mamiano di Traversetolo, située à quelques kilomètres de Parme, une importante rétrospective de l’œuvre du peintre suisse Johann Heinrich Füssli.
PARME - Né à Zurich en 1741, Johann Heinrich Füssli a vécu à Londres de 1779 à sa mort, en 1825, où il fut inhumé dans la cathédrale Saint-Paul sous le nom de Henry Fuseli. Bien qu’il ait été le contemporain d’artistes tels que David et Canova, ou d’écrivains et de philosophes comme Gœthe, Novalis ou Herder, il est difficile de le rattacher à un courant artistique particulier. S’il a revendiqué l’optimisme rationaliste du siècle des Lumières dont il était lui-même l’un des théoriciens, il fut aussi frappé par l’angoisse que lui inspirait l’exploration de la profondeur insondable de l’âme humaine quand il choisit de traduire en peinture, avec une grande liberté d’interprétation, les œuvres théâtrales ou littéraires majeures d’Homère, Dante, Milton et Shakespeare. Du reste, cette relecture l’a amené à repenser, voire à déformer, la vision antique de la réalité, souvent par le biais d’une stylisation maniériste, pour mieux souligner l’impossibilité d’une récupération de ces œuvres par le courant classique. Quoi qu’il s’affirme convaincu de l’excellence des Grecs dans toutes les formes artistiques, Füssli se refuse, dans sa propre production, à appliquer les théories néoclassiques de Winckelmann, qui considère la sérénité, le calme et l’impassibilité comme autant de principes directeurs de la vraie beauté.
Drame shakespearien
Le "sublime", chez Füssli comme chez d’autres artistes que l’on rattache au mouvement préromantique, ne naît pas de la grandeur des œuvres classiques en tant que formes idéales. Tout au contraire, il a pour origine une confrontation à l’horreur ou à l’épouvante, comme le veut la théorie développée par Burke dans l’essai qu’il a consacré, en 1756, à l’esthétique du sublime. Les œuvres que Füssli a exécutées tout au long de sa carrière, sous l’influence du théâtre de William Shakespeare – peintures, dessins et gravures –, et notamment des tragédies et comédies dans lesquelles le dramaturge fait allusion aux mythes et aux légendes mettant en scène fantômes, fées et lutins, se trouvent en parfaite harmonie avec cette vision onirique, symbolique et exaltée de l’univers.
Du peintre à l’imagination fantasque, si souvent remarquable, la Fondation Magnani Rocca possède un dessin, Gertrude, Hamlet et le fantôme du père d’Hamlet (1793), inspiré du drame de Shakespeare, qui a donné aux organisateurs le thème de l’exposition. Celle-ci comprend plus de quatre-vingts toiles, dessins et gravures illustrant le Songe d’une nuit d’été, Macbeth, Hamlet, Richard III, Henri VI, le Roi Lear, la Tempête, Beaucoup de bruit pour rien, Roméo et Juliette..., prêtés par de nombreux musées européens et américains, ainsi que par des collectionneurs privés. Une section est réservée aux travaux des peintres contemporains de Füssli – George Romney, J. Northcote, T. van Holst – qui ont eux aussi choisi d’illustrer des sujets shakespeariens. Enfin, pour mieux souligner les liens entre le théâtre élisabéthain et le peintre, le Festival de théâtre de Parme a consacré tout programme de septembre aux pièces de Shakespeare.
FÜSSLI, PEINTRE DE SHAKESPEARE : PEINTURE ET THÉÂTRE, jusqu’au 7 décembre, Fondation Magnani Rocca, via Vecchia di Sala 18, Mamiano di TraverseÂtolo (Parme), tél. 39 521 84 83 27, tlj sauf lundi 10h-17h.
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The full Füssli à Parme
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°47 du 7 novembre 1997, avec le titre suivant : The full Füssli à Parme