Ce sont deux expositions que propose le Petit Palais sous la même bannière injonctive : « Fantastique ! ».
La première est une rétrospective pionnière consacrée à Utagawa Kuniyoshi (1797-1861), cet imagier que le parcours, riche de scènes cosmologiques, de paysages panoptiques ou de visions tératologiques, impose comme l’égal d’Hokusai ou d’Hiroshige. Avec leurs couleurs presque inaltérées, avec leurs lignes sinusoïdales et leurs compositions audacieuses que plébiscitèrent Rodin et Monet, les estampes de ce maître du « monde flottant » trahissent un sens synthétique et une imagination débridée dignes de Bosch et d’Altdorfer. Les éventails ne démentent pas les gravures, les ombres superbes ne contredisent pas les images diaprées : les pièces réunies permettent de naviguer dans cet univers tempétueux où cohabitent des moines virils, des squelettes inquiétants et des femmes évaporées.
Conçue en trois mouvements distincts – romantique, réaliste et symboliste –, la seconde exposition investigue « l’estampe visionnaire », de Goya à Redon en passant par Klinger et Delacroix, mais aussi Meryon et Bresdin, tous ces maîtres oubliés dont la veine noire, vantée par Focillon, irrigua la création plastique, mais aussi littéraire. Cette anthologie peuplée de chefs-d’œuvre incontournables abrite également des pièces plus confidentielles, ainsi celles – splendides – d’un Maurice Dumont (Les Pendus, 1891) et d’un Valère Bernard (Guerro, 1895). Maladroitement bivalve – les deux manifestations se succédant, le visiteur ne peut accéder à la seconde qu’au terme de la première –, le parcours se distingue par la qualité de son accrochage et par l’opportunité de ses espaces didactiques, réservés aux techniques de l’estampe. De même, le scénographe Didier Blin, en alternant des rouges profonds, des verts olive et des gris ardoise, en usant de vitrines et de plans inclinés, anime, étymologiquement « donne du souffle » à ce monde où s’ébrouent les mystères et les chimères. Un monde moins fantastique que fantasmagorique.
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D’une estampe l’autre
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Abonnez-vous dès 1 €Petit Palais, Musée des beaux-arts de la Ville de Paris, avenue Winston-Churchill, Paris-8e, www.petitpalais.paris.fr
Légende Photo :
Rodolphe Bresdin, Comédie de la mort, 1854, Lithographie © BnF
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°684 du 1 novembre 2015, avec le titre suivant : D’une estampe l’autre