Dans le secret des lieux

Les explorations de Lynne Cohen (1944-2014) sur le sujet ont marqué et inspiré des générations d’artistes. Leur mise en dialogue, pour la première fois, avec celles menées depuis près de 20 ans par Marina Gadonneix illustre leurs itinéraires et démarches artistiques respectives dans un glissement d’une œuvre à une autre d’une grande finesse. Marina Gadonneix a découvert Lynne Cohen au début des années 2000 au travers de son livre Occupied Territory quand elle était étudiante à l’École nationale supérieure de la photographie d’Arles. Les photographies en noir et blanc d’intérieurs de salons, de halls d’entrée, de bureaux, de salles de classe ou d’entraînement, désertés momentanément, formaient un catalogue de lieux fascinants tant par leur atmosphère singulière, mystérieuse, voire inquiétante, que par ce qu’ils disaient de la société américaine. Excepté une correspondance entamée avec Lynne Cohen avant sa disparition en 2014, Marina Gadonneix n’a jamais rencontré l’artiste canadienne. Ce qui l’intéresse davantage, ce sont les dispositifs d’un studio de télévision, d’effets spéciaux ou de photographie où l’on reproduit des œuvres d’art, ou d’un laboratoire scientifique pour simuler des phénomènes naturels (ouragans, avalanche, séisme, etc.) ou des collisions de trous noirs. Les agencements géométriques ou picturaux qu’ils induisent, l’artiste s’en saisit pour en donner une esthétique abstraite sublime et intrigante qui convoque autant la photographie scientifique que l’histoire de l’art, tout en la prolongeant.