À l’occasion du vingtième anniversaire de la disparition de Charlotte Perriand, la Fondation Vuitton rend hommage à cette femme architecte-designer, icône de la modernité.
Cette exposition en tous points exceptionnelle occupe la totalité des espaces de la fondation, intérieurs et extérieurs, avec deux cents œuvres de la designer, et fait la part belle aux reconstitutions d’espaces créés par elle. Le visiteur semble déambuler dans un gigantesque appartement : le bar sous le toit avec ses meubles métalliques qui lui vaut en 1927 son premier succès public et amorce sa carrière d’architecte-designer, l’équipement intérieur d’une habitation au Salon d’automne de 1929 avec Le Corbusier et Jeanneret (reflet d’une conception nouvelle en matière d’architecture intérieure), La Maison du jeune homme de 1935 (habitat type de 16 m2 comprenant tous les éléments nécessaires à la vie quotidienne), La Maison au bord de l’eau posée sur une simple structure en acier et en bois offrant des unités d’habitation de part et d’autre d’un ponton, le Tonneau (refuge de montagne), la Maison de thé éphémère, son ultime création japonaise (1993) dédiée au recueillement et à la méditation, la construction de la station de ski des Arcs qui voit l’aboutissement de ses recherches sur l’habitat collectif et l’aménagement intérieur, etc. Au cœur de cet univers, le mobilier, qui a bouleversé la manière de concevoir « l’art d’habiter » : la table extensible, le fauteuil pivotant, la chaise longue pivotante métallique de 1929 – cette fameuse chaise longue n’a longtemps été attribuée qu’à Le Corbusier, scorie d’une époque sexiste –, dont elle réalise une transposition en bambou pour sa première exposition aux Grands Magasins de Takashimaya de Tokyo en 1941, la chaise Ombre et la bibliothèque Nuage présentées lors de la deuxième exposition japonaise « Synthèse des arts », la cuisine de la Cité radieuse de Marseille qui devient le cœur de la vie domestique ou encore le tabouret Méribel inspiré d’un tabouret de traite. Un mobilier assez bas pour permettre au visiteur d’admirer les deux cents œuvres de ses amis artistes : Fernand Léger avec lequel elle nouera une amitié personnelle et professionnelle durable, Picasso, Miró, Braque, Noguchi, Soulages, Delaunay, Lipchitz, Le Corbusier, ainsi que ses propres photos de nature et d’architecture. Une moderne parmi les modernes.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°730 du 1 janvier 2020, avec le titre suivant : Chez Vuitton comme Chez Perriand