ARTS PREMIERS

Chefs-d’œuvre de couvre-chefs

Par Olympe Lemut · Le Journal des Arts

Le 4 juillet 2019 - 469 mots

La donation faite par Antoine de Galbert en 2017 au Musée des Confluences illustre l’immense diversité des coiffes et chapeaux dans les sociétés non occidentales, et fait ressortir leurs fonctions communes.

Lyon. Animé d’une « passion privée » pour les coiffes, Antoine de Galbert a construit une collection de 500 pièces sur trente ans, dont 300 sont aujourd’hui présentées au Musée des Confluences dans une scénographie foisonnante. Peu de coiffes viennent d’Europe, un choix qui reflète l’attirance du collectionneur pour l’Afrique et l’Asie.

Pour fabriquer des couvre-chefs, les hommes ont recours à des matériaux très variés, et parfois surprenants : ainsi des coiffes de femmes Miao (Chine) arborent-elles des mèches de cheveux tissés, ou les couronnes tribales Yanomami (Venezuela) intègrent-elles des dépouilles d’oiseaux ! Plus souvent, ce sont des fibres végétales, des coquillages, du cuir, du métal et des morceaux de tissu : chaque population ou ethnie combine ces éléments selon des règles établies formant un code.

« Une lecture esthétique à côté de la lecture culturelle »

Une coiffe transmet des informations sur le statut social de celui ou celle qui la porte, sur son origine ethnique ou sa fonction au sein de groupe. Outre les coiffes destinées à protéger les enfants, les parures les plus nombreuses concernent le statut nuptial des jeunes gens et jeunes filles, les hommes de pouvoir (guerriers, chefs de clan) et ceux de religion (devins, chamans, marabouts). Ainsi de cette remarquable coiffe d’initié Banda de Centrafrique, hérissée de pointes de flèches enduites de kaolin. Elle a été portée pendant la cérémonie de circoncision des adolescents.

Les coiffes de chefs et de guerriers se parent, elles, de couleurs flamboyantes, telles les couronnes de plumes d’Amazonie (coiffes Iny-Karajà, Brésil) : il faut bien impressionner ses adversaires et asseoir son autorité. Enfin les coiffes de chamans et marabouts reflètent les pouvoirs dont sont dotés ces hommes, sous une apparence plus sobre : il entre dans leur composition de nombreux éléments animaux tels des piquants de porc-épic (coiffe Tamang, Népal), plumes, scarabées, dents d’hippopotame ou de grizzli, qui marquent l’appartenance du chaman à un autre monde que celui des humains.

Pour Antoine de Galbert, le fait que ces pièces servent dans des rituels participe de la « fascination » qu’elles exercent, sans empêcher « une lecture esthétique à côté de la lecture culturelle ou ethnographique ». L’observation ethnographique permet de constater des évolutions récentes dans les matériaux utilisés (intégrant du plastique) et dans les conditions de monstration des coiffes. Il est fréquent en effet de voir ces attributs utilisés dans des spectacles ou festivals culturels en Asie et en Amérique latine, sans que la limite entre tradition et folklore soit claire : les rituels autrefois secrets deviennent publics. D’après Antoine de Galbert, qui ne cherche pas toujours à connaître les détails ethnographiques, l’essentiel, c’est que les coiffes « soient encore portées aujourd’hui », c’est-à-dire qu’elles soient vivantes.

Le monde en tête, la donation Antoine de Galbert,
jusqu’au 15 mars 2020, Musée des Confluences, 86, quai Perrache, 69002 Lyon.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°527 du 5 juillet 2019, avec le titre suivant : Chefs-d’œuvre de couvre-chefs

Tous les articles dans Expositions

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque