Soulages, XXIe siècle

En partenariat avec la villa Médicis, le Musée des Beaux-Arts de Lyon consacre une exposition à un maître de l'abstraction française, Pierre Soulages. Présenté à l'occasion de l'acquisition récente de trois de ses oeuvres, \"Soulages au XXIe siècle\" en expose une vingtaine d'autres réalisées ces douze dernières années, pour la plupart à l’acrylique - dont quelques tableaux inédits - actualisant la recherche de l'Outrenoir entamée en 1979.

D'un premier paysage de neige dessiné à l'encre de chine à l'âge de six ans, le rodézien n'en était que plus pré-destiné à faire du noir, son signe distinctif. Une couleur que l'artiste affirme pourtant avoir découverte par hasard. « Un jour de janvier 1979 que je peignais, le noir avait envahi toute la surface de la toile...j'ai vu en quelque sorte la négation du noir, les différentes textures réfléchissant plus ou moins faiblement la lumière ». Depuis, résolument séduit par « cette lumière secrète venue du noir », le peintre se plait à en observer le comportement et les réactions, par le travail de la matière sans cesse renouvelé.

Si l'artiste n'a de cesse de décliner à l'infini les possibilités de faire advenir la lumière au sein du noir qu'il préfère « abandonner au regard du public » plutôt que d'expliquer, aussi s'attelle-t-il en ce début de siècle à élargir le champ des expérimentations, produisant des effets tactiles et visuels jusqu'alors inconnus. De nouveaux tableaux se dessinent.

Outre collages et juxtapositions de surfaces lisses et plus modelées, aussi se permet-il d’incorporer du blanc au noir et davantage. En témoignent deux toiles striées datées de mars 2012 que dévoile « Soulages au XXIe siècle ». Face à l’une tout « logiquement » recouverte de noir, l'autre - parcourue de quelques tracés sinueux inscrits dans l'épaisseur de la matière - se distingue à l’inverse par sa blancheur intacte.

Quant à l'unique mur blanc que compte la salle « initiatique », il sert à refléter la lumière des projecteurs - arbitrés par l'artiste lui-même - sur les toiles dressées de part et d'autres des murs noirs, conviant ainsi le visiteur à vivre l'expérience de l'Outrenoir et à se laisser pénétrer par sa force émotionnelle rendue possible par le jeu des ombres et des reflets.

Pour une compréhension rétrospective du travail actuel de l’artiste, en plus d’un ensemble de sept toiles réalisées pour la Biennale d’art contemporain de Lyon en 1991, on compte également Peinture 202*143 (1967) représentant un vaste champs dominé par le noir, raclé ici et là de quelques tâches mâtiné d’ocre et de blanc, un Brou de noix sur papier daté de 1947 révélant la force et la gravité des toiles conçues à ses débuts - dont la spécificité première tient à l’usage de sa matière inhabituelle – et enfin, Peinture 181*144 (2009) marquant l’aboutissement de sa quête de lumière picturale irradiant des bas-reliefs : l'Outrenoir.