08 fév. - 05 avr. 2008
Paris
Galerie Jérôme de Noirmont
Shirin Neshat - Nouvelles œuvres
La force de cette artiste est d’éviter de confondre art avec journalisme. Il ne s’agit pas d’une expo à thèse, nous avons bien davantage affaire au regard très sensible d’une artiste sur son pays avec comme leitmotiv l’image de la femme voilée. Il s’agit, via des images puissamment poétiques, de nous parler du contexte politique iranien des années 50 et de mêler subtilement l’individuel et l’universel, le biographique et l’Histoire - ainsi on évite les généralités hâtives et les stigmatisations qui feraient de son expo un pensum idéologique.
Ayant de toute évidence assimilé la puissance des images, Neshat nous fait parfaitement entrer dans ses récits. Je vous conseille d’ailleurs, pour pleinement profiter de l’expo, de commencer à l’étage par la contemplation des deux films puis de finir au rez-de-chaussée par l’observation des photos, celles-ci s’enrichissant davantage encore par le fait d’avoir en mémoire des bribes d’images en mouvement. L’écran persan en format Cinémascope se fait vite perçant. A l’étage, la salle de cinéma, plongée dans le noir complet, permet de pleinement profiter des deux vidéos (13 mn chacune, sous-titrages en anglais) absolument splendides et riches d’affects, de sensations et de sens. Ces vidéos, très soignées, portent les noms des femmes dont elles racontent l’histoire : pour Munis, il s’agit d’une femme se suicidant pour rejoindre un activiste tué mais, par-delà la mort, elle se rend compte que le réel est plus complexe qu’il n’y paraît et pour Faezeh, il s’agit d’une femme religieuse ayant été violée et dont la projection dans un mariage à venir est hantée par la vision d’une femme voilée en noir, elle finira par sombrer dans la folie. A l’étage en dessous, les photos sont superbes. Une série en N&B nous présente des scènes de manifestations (été 53 à Téhéran) s’apparentant à des chorégraphies urbaines pendant qu’une autre série nous présente des photos couleur d’hommes et de femmes iraniens de cette époque. Ces tirages sont rehaussés par une calligraphie à l’encre, formant comme des rides ou des stries sur la « peau » de la photo et autres, venant ainsi ajouter du mystère à la chose. Seule ombre au tableau, malgré la beauté indéniable des portraits, le coup des écritures sur les photos a un air de déjà-vu, c’est beau et très poétique mais on ne peut s’empêcher d’y voir une certaine facilité graphique à l’œuvre. Mais bon, ne chipotons pas trop, ça reste une très belle expo à voir.
- Informations pratiques
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GALERIE JÉRÔME DE NOIRMONT
36-38, avenue Matignon
Paris 75008
Ile-de-France
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