On a beau s’en défendre lors de la visite des pavillons nationaux de la Biennale de Venise, mais on y attend un dépaysement, une carte d’identité artistique des pays exposés individuellement.
Un étiquetage parfois inconscient qui a toujours horripilé Candice Breitz, Sud-Africaine blanche vivant entre l’Allemagne et les États-Unis. Le pavillon de l’Afrique du Sud, qu’elle partage avec l’artiste Mohau Modisakeng, a trouvé abri dans un bâtiment de l’Arsenal, et la vidéaste y fait une démonstration brillante de cette fatalité que peut représenter un lieu de naissance. Dans Love Story (2016), opus vidéo en deux volets, elle confronte tout d’abord le spectateur à deux stars américaines : Alec Baldwin et Julianne Moore. Sans fard, installés devant un fond vert servant aux incrustations, chacun incarne en grand format, un immigrant qui raconte sa fuite, les pressions qui l’ont poussé à tout abandonner. L’émotion progresse du subtil au grandiose, elle submerge. C’est en passant à une salle arrière qu’apparaissent les véritables témoins dont Breitz a recueilli la parole. Ils parlent eux aussi face caméra, isolés sur des écrans de télévision. Dignes, ils ne jouent pas, eux, le récit de leur vie, la difficulté à tout laisser derrière soi. De la dramatisation hollywoodienne à la sobriété de l’authenticité, quel témoignage saura retenir l’attention, susciter le plus d’émotion, d’empathie ? C’est à cette dure réalité du filtre médiatique que Breitz confronte le spectateur pour le faire méditer sur ce que l’on veut bien voir et entendre de ces hommes et ces femmes de Syrie, de la République démocratique du Congo, de l’Inde, du Venezuela, de la Somalie, d’Angola, où ils ont frôlé la mort. Sans donner de leçons, cette histoire d’amour est magistrale.
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Être né quelque part
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°704 du 1 septembre 2017, avec le titre suivant : Être né quelque part