ROME (ITALIE) [16.02.17] - Deux bustes antiques, saccagés par l'organisation de l'Etat Islamique sur le site de Palmyre, seront bientôt rendus à la Syrie après leur restauration en Italie, \"sans doute les seules oeuvres d'art sorties (légalement) de la zone du conflit syrien\".
"C'est l'illustration d'un thème qui nous est cher : celui de la diplomatie culturelle, le fait que la culture puisse être un instrument de dialogue entre les peuples, même lorsque les circonstances sont difficiles", a déclaré jeudi le ministre italien de la Culture, Dario Franceschini. "Et en même temps, cela met en valeur les grandes compétences de l'Italie en matière de restauration d'oeuvres d'art", a ajouté le ministre en présentant à la presse les deux bustes antiques dans les laboratoires de l'Institut supérieur de conservation de Rome.
Après quatre semaines de restauration, les deux hauts-reliefs datant des IIe et IIIe siècles seront rendus aux autorités syriennes à la fin du mois. Pour l'ancien maire de Rome, Francesco Rutelli, l'opération est aussi "une façon de rendre hommage" à l'ancien chef des Antiquités de Palmyre, Khaled al-Assaad, assassiné en août 2015 à 82 ans par les jihadistes de l'organisation de l'Etat Islamique (EI). Avant d'être exécuté, ce grand spécialiste du site de Palmyre "était parvenu à cacher des centaines d'oeuvres d'art mais pas ces deux bustes qui étaient tombés aux mains des hommes de l'EI", a expliqué M. Rutelli, promoteur de cette restauration via l'association "Incontro di Civiltà" (rencontre de civilisation) qu'il préside.
Depuis sa montée en puissance en 2014, l'EI a ravagé plusieurs sites, dont certains classés au Patrimoine mondial de l'Unesco, car il considère les statues ou les mausolées comme de l'idolâtrie qui doit être combattue. A Palmyre, qu'il a occupée de mai 2015 à mars 2016, puis reprise à l'armée le 11 décembre, le groupe extrémiste sunnite a détruit les plus beaux temples, des tours funéraires ainsi qu'un grand nombre d'oeuvres d'art. Mais l'organisation terroriste tire également une partie de ses financements grâce au recel des objets antiques qu'elle ne saccage pas de façon spectaculaire devant les caméras.
Combat idéologique
Les deux bustes, dont les visages avaient été gravement endommagés à coups de marteau, ont pu être transférés à Rome, via le Liban, après avoir été mis à l'abri à Damas au moment de la récupération de Palmyre par les troupes syriennes, a expliqué Francesco Rutelli. Selon lui, "ce sont peut-être les seules oeuvres d'art sorties de la zone de conflit syrien qui n'ont pas été volées et qui ont quitté le pays pour être restaurées". "Ce geste n'a aucune valeur politique de soutien de notre part pour une quelconque position. L'Italie l'a fait et le fera quel que soit le pays qui le demande", a-t-il affirmé. Une polémique a éclaté dans le monde des archéologues sur le bien-fondé d'une collaboration avec le régime du président Bachar al-Assad, dans les zones "libérées" par l'armée syrienne.
Un mois de travail et cinq personnes ont été nécessaires pour rendre un visage humain aux deux bustes, l'un masculin l'autre féminin. Sur l'un d'eux, dont le haut du visage avait été perdu, le spécialistes ont reconstruit le morceau manquant à l'aide d'un imprimante 3D, une technique jamais utilisée jusqu'alors pour ce type de restauration, ont-ils expliqué aux journalistes. Constituée de poudre de nylon synthétique, la pièce nouvellement créée a été fixée sur le visage à l'aide de plusieurs aimants, "ce qui la rend totalement amovible, conformément au principe qui veut que toute restauration soit toujours réversible", a expliqué l'un des restaurateurs Antonio Iaccarino. "Ce que l'Etat Islamique a détruit nous l'avons reconstruit. Par le biais de la culture, nous menons aussi un combat idéologique", a-t-il conclu.
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Détruits, puis restaurés : deux bustes antiques vont retourner en Syrie
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Abonnez-vous dès 1 €Un restaurateur italien pose le morceau manquant réalisé à l'aide d'une imprimante 3D sur le visage d'un des 2 bustes, à l'Institut Supérieur de Conservation et de Restauration (ISCR - Istituto Superiore per la Conservación ed il Restauro) à Rome, le 16 février 2017 © photo Alberto PIZZOLI / AFP