Parallèlement à La Barque de Dante, Le Louvre expose une sélection des dessins
de Delacroix appartenant à ses fonds.
Après Ingres, Delacroix. Les expositions de dessins du musée du Louvre reconduisent ainsi la traditionnelle opposition entre les deux artistes, perçue, de leur vivant, comme un véritable antagonisme. La vieille querelle du dessin et du coloris resurgit alors, portée, à leur insu, par ces deux nouveaux champions ; à Ingres, la ligne, le dessin, la pureté de la forme classique, à Delacroix la couleur expressive, les effusions de l’âme romantique. Il fallut la vente après décès de milliers de dessins de Delacroix, pour que l’opinion publique commence à réaliser le rôle essentiel du dessin dans son œuvre. L’artiste, écrit Philippe Burty en 1880, avait souhaité « qu’après sa mort ses dessins vinssent, comme un argument solennel, protester contre les reproches amers d’improvisation et de facilité dont on l’avait poursuivi… » S’il en était encore besoin, cette masse impressionnante de dessins prouve à quel point ses compositions étaient élaborées, et étudiées dans leur moindre détail. Le musée du Louvre possède un fonds de près de trois mille feuilles et vingt-trois albums (dont plus de la moitié résulte du legs Moreau-Nélaton en 1927) encore enrichi par l’acquisition récente de l’Album « des Pyrénées », classé « trésor national ». L’exposition rend compte des nombreuses facettes de cet œuvre dessiné : dessins d’après nature, animaux, paysages aquarellés, croquis « enluminés » du voyage au Maroc (ill. 7), copies d’après les maîtres, premières pensées et études plus ou moins poussées pour les suites lithographiques, les grandes compositions et les grands décors.
« Le dessin de Delacroix est à celui de M. Ingres ce que le feu est à la glace », écrivait Théophile Sylvestre. Ce feu est celui de l’imagination, qui emporte la main et l’empêche de rien figer sur le papier. C’est un dessin de coloriste, qui ignore le contour fermé, et suggère, plus qu’il ne les décrit, les formes en mouvement dans l’espace ; un dessin qui véhicule tout le frémissement de l’émotion initiale. Une feuille, parmi tant d’autres, illustre merveilleusement cette conception graphique, c’est l’Étude de femme nue (ill. 8) pour Sardanapale, qu’on a comparée à une fleur tranchée, et qui cristallise toute la volupté et la cruauté que l’artiste projetait dans ce thème.
« Eugène Delacroix, dessins du Louvre », jusqu’au 5 juillet, 2e étage de l’aile Sully, accès avec le billet d’entrée du musée.
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Delacroix en traits de feu
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°559 du 1 juin 2004, avec le titre suivant : Delacroix en traits de feu