La référence aux arts visuels n’est pas le point de départ du processus créatif de Philippe Saire, qui préfère partir du dispositif technique. Cependant, les jeux de clair-obscur sur la peau de danseurs au contact de néons dans Vacuum (2015) ne sont pas sans faire écho, selon le chorégraphe, à Rembrandt, Le Caravage ou James Turrell. Les corps qui apparaissent et disparaissent dans la fumée dispersée sur l’espace scénique de Ether (2018) lui évoquent les nuages des tableaux d’inspiration biblique. Neons (2014) révèle, par le mouvement des corps et leur subtil éclairage, une infinité de nuances de gris. La force esthétique du charnel et de l’immatériel n’est pas seule en scène dans les pièces chorégraphiques de Dispositifs, qui explorent également le mouvement et l’empreinte de la matière. Toujours selon son créateur, c’est l’« Outrenoir » de Pierre Soulages qui s’immisce dans Black Out (2011), où les mouvements successifs de trois danseurs évoluant dans une poussière noire sur un sol blanc viennent composer une œuvre plastique au sein d’une création chorégraphique. Ces corps, qui créent une matière picturale par le mouvement sous les yeux du spectateur, résonnent aussi avec la performance Anthropométrie de l’époque bleue d’Yves Klein en 1960, où des corps enduits de peinture bleue laissaient leur empreinte sur la surface blanche du mur. À l’heure d’un décloisonnement foisonnant des arts de la scène et des arts visuels, Dispositifs magnifie, à travers quatre variations, la beauté d’un dialogue entre deux disciplines qui occupent chacune leur juste place, ne se contentant pas, comme parfois hélas dans de nombreuses créations contemporaines, d’une simple mise en contact.
Quoi ?
Dispositifs, Compagnie Philippe Saire
Où ?
Centre culturel suisse de Paris
Quand ?
du 14 au 25 mai 2018
Comment ?