Suisse

Genève

Trois plateaux et mille découvertes

Par Anaïd Demir · Le Journal des Arts

Le 7 juillet 2006 - 519 mots

Le Mamco présente neuf nouvelles expositions monographiques.

GENÈVE - C’est peut-être parce que le Mamco (Musée d’art moderne et contemporain), à Genève, se présente comme un mille-feuille de découvertes que le musée a initié un cycle intitulé « Mille et trois plateaux ». Un peu aussi en hommage aux Mille plateaux de Deleuze et Guattari, cela s’entend !
« Conjonctions », le sixième épisode de la série, présente aujourd’hui neuf expositions monographiques parallèlement à un raccrochage des collections. La peinture figurative s’y trouve au premier plan, à travers les œuvres de Luc Tuymans, Philippe Cognée.
Le Belge Luc Tuymans nous propose une galerie de portraits dont les couleurs rendent compte de l’effacement de l’être. Ces visages aux teintes terreuses se succèdent comme des ombres et s’estompent chaque fois un peu plus comme des souvenirs solubles dans l’eau. La Suissesse Sylvia Bächli se situe davantage dans l’idée d’une rétention du temps. Ses dessins et aquarelles – une activité pratiquée au quotidien – se lisent comme les pages d’un journal personnel. Noir sur blanc, les impressions du jour s’impriment. Des spirales, des grilles, des plantes de coton, des jambes, des corps et des paysages de neige… Les lignes s’entrecroisent et le noir et blanc a l’air de prendre de la couleur. À l’opposé, Philippe Cognée nous mène au cœur de la couleur, là où le sang afflue, dans son ultime course : aux abattoirs. Dans sa suite picturale de carcasses bovines, la tension a été gommée pour n’en garder que l’aspect clinique : les toiles de Cognée sont toujours adoucies par une couche d’encaustique.

Pâtisseries et chamallows
Poète de l’angoisse par excellence, Laurent Faulon, dont la présence dans les expositions est trop rare, nous invite à une symphonie de réfrigérateurs. Tous plus ronflants et abîmés les uns que les autres, posés au sol comme des tombeaux, ces quarante-deux blocs délivrent leur harmonieuse partition mortuaire. Une forêt de pylônes surmontés de pâtisseries semblent placer le musée en position de danger, alors qu’Anita Molinero déconstruit sensuellement la salle qu’elle occupe avec des œuvres suspendues ou qui s’accrochent aux murs du musée comme des chamallows géants et autres formes organiques. L’artiste travaille in situ à partir de déchets. Ici, le polystyrène d’emballage, la mousse et le plastique fondu donnent à voir de légères et précieuses sculptures. Autre temps fort : la présence de Douglas Huebler – sur une proposition du Cabinet des estampes de Genève. Le conceptuel américain rejoue ensemble l’espace, la géographie et le temps. Plus terre à terre, les photographies de Jean-Marc Meunier montrent des centres-villes de mégalopoles qui semblent avoir perdu leur identité dans la globalisation et le consumérisme.
Genevois quant à lui, Denis Savary nous communique un état introspectif à travers une simple et courte vidéo qui, en deux minutes à peine, révèle un nouveau point de vue sur un paysage nocturne apparemment sans vie. Et ceci n’est qu’un échantillon des mille artistes à découvrir au fil de cette ballade sur les trois niveaux du Mamco.

Conjonctions

Jusqu’au 17 septembre, Mamco, 10, rue des Vieux-Grenadiers, Genève, Suisse, tél. 41 22 320 61 22, du mardi au vendredi 12h-18h, samedi-dimanche 11h-18h.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°241 du 7 juillet 2006, avec le titre suivant : Trois plateaux et mille découvertes

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