Les œuvres de Dewasne, dont le Musée du Cateau-Cambrésis présente un large aperçu, s’imposent d’abord par leur puissance chromatique.
LE CATEAU-CAMBRÉSIS - C’est entendu. Jean Dewasne mérite sa place dans l’histoire de l’art du XXe siècle. Né en 1921 à Lille, il fait partie de la seconde (troisième ?) génération de peintres qui pratiquent l’abstraction géométrique. Il est lauréat du prix Kandinsky lors de sa première édition en 1946 et, coopté par Auguste Herbin, il entre dans le comité directeur du Salon des réalités nouvelles. C’est d’ailleurs la riche collection d’Herbin, admiré par Dewasne, qui procure au musée la justification pour l’exposition présente. Mais en réalité, l’origine de cette série de manifestations qui va se poursuivre au Musée de Cambrai et au Laac à Dunkerque est la généreuse donation faite à l’État par Mythia Dewasne à la suite du décès de son époux en 1999.
Dans ce partage, le rôle attribué au Musée Matisse du Cateau-Cambrésis (Nord) est de mettre en scène l’apport original de l’artiste avec, d’une part, ses « Antisculptures » et, d’autre part, ses expérimentations dans le domaine de l’architecture. Une évidence se dégage d’emblée : c’est la couleur qui est l’élément unificateur dans toute la production plastique de Dewasne. Qu’il s’agisse du volume ou de l’espace construit, elle est posée en aplats, ses différentes teintes vives sont clairement délimitées, toute trace de matière en est absente. Cette puissance chromatique s’impose et fait dire à l’historienne et critique d’art Lydia Harambourg qu’il : « peint le volume comme un tableau qui aurait des bosses et des trous ».
Drôle de peintre toutefois, car rares sont les toiles qu’il réalise. Plutôt sculpteur, mais un sculpteur qui fait appel aux objets, le plus souvent mécaniques. Évoquant son trajet, Dewasne raconte que la première fois qu’il s’est attaqué aux trois dimensions, c’était avec une voiture de course (une Ferrari, de surcroît) qu’il a sciée et recouverte de couleur.
L’attirance de Dewasne pour l’industrie ne s’arrête pas à cette anecdote. Il est parmi les artistes qui collaborent avec la Régie Renault en utilisant des morceaux de carrosserie pour leurs travaux, des surfaces creusées ou bombées. C’est aussi à cette occasion qu’il réalise une commande murale importante pour le décor de la salle des ordinateurs de cette entreprise. D’autres interventions sur l’architecture publique, souvent de taille monumentale (le Stade olympique de Grenoble, la Grande Arche de la Défense…) témoignent de l’investissement de l’artiste dans la vie de la cité, de son engagement politique.
Le vocabulaire plastique de Dewasne varie peu : des formes géométriques droites ou courbes, des bandes qui serpentent sur des surfaces variées de manière plus ou moins régulière, sans éviter une certaine monotonie. On est en revanche impressionné par la série des Antisculptures au titre étrange de Cerveaux Mâles. Ces machines tronquées, qui semblent dressées sur des pattes métalliques, ont l’apparence de totems modernes, fascinants et inquiétants à la fois.
Commissaire : Patrice Deparpe, conservateur adjoint au Musée Matisse
Nombre d’œuvres : 40
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
L’industrie sur un piédestal
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Jusqu’au 9 juin, Musée Matisse, palais Fénelon, 59360 Le Cateau-Cambrésis, tél 03 27 84 64 50
museematisse.cg59.fr
tlj sauf mardi de 10h-18h.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°413 du 9 mai 2014, avec le titre suivant : L’industrie sur un piédestal