Fort de caractère

Il est vrai que, en ces confins du pays de Gex, ledit ouvrage, juché à 430 m d’altitude, en impose. Érigé à partir du XVIIe siècle, mais surtout au XIXe siècle par le général-ingénieur Haxo – dont le maître à penser n’était autre que… Vauban –, ce joyau du génie militaire est aujourd’hui devenu un atout patrimonial et touristique. Un trio d’architectes, Atelier PNG, planche à cet effet, depuis 2012, sur la revalorisation du site. « Notre projet est né de l’observation fine du territoire et du fort lui-même, raconte Antoine Petit, l’un des associés d’Atelier PNG. Nous ont inspirés les différentes constructions militaires ou les gabions présents en nombre dans la région et, sur place, les plafonds en voûtains ou des matériaux comme le métal ou la brique. » L’intervention s’est déployée en trois temps : aménagement de l’accueil, de la billetterie et de la cafétéria (2012-2016), puis construction d’un ascenseur pour améliorer l’accessibilité et création d’une salle d’exposition permanente (2016-2019), et enfin conception de la scénographie (2019-2020). Surface : 100 m2 pour l’accueil et 140 m2 pour la salle d’expositions. Coût des travaux : un million d’euros HT.Les conditions climatiques locales sont rudes. À l’intérieur du fort, l’eau, en hiver, peut ruisseler sur la roche apparente. « L’idée a donc consisté à ne pas mettre en contact notre aménagement avec la paroi naturelle, histoire de rester le plus au sec possible », indique Antoine Petit. Toutes les cloisons, ainsi que le mobilier statique, sont faits de panneaux ajourés en acier galvanisé. Logée dans l’entrée voûtée, la cuisine, par exemple, est protégée de l’eau qui pourrait suinter par une toile invisible, laquelle reprend l’exacte courbure de la voûte. Les luminaires fixes sont eux aussi en métal, tandis que le sol, lui, est en briques de pouzzolane.Dans la cour supérieure, la pièce maîtresse n’est autre qu’un ascenseur, dont la structure s’élève à 18 m de hauteur pour desservir trois niveaux. Site naturel classé oblige, au lieu d’une cage de verre (option abandonnée notamment pour cause de reflets trop importants pour les oiseaux migrateurs), le trio a opté pour une structure métallique habillée de part et d’autre de gabions conçus à partir des gravats d’un contrefort démoli. Cette nouvelle aile arbore une subtile impression de modernité et, en même temps, grâce au matériau recyclé, donne le sentiment d’avoir toujours été là. Autre avantage : « Cette filière sèche, autrement dit sans aucune maçonnerie, fait que tout est démontable, souligne Grichka Martinetti, autre associé. On ajoute une couche supplémentaire à l’histoire du fort, mais en douceur, parce que rien n’est définitif. » En juin, l’inauguration de la scénographie de l’exposition permanente logée dans la Porte de France signera l’achèvement complet du chantier. La terrasse offre, au sud-est, un panorama à couper le souffle : en contre-plongée, un majestueux coude du Rhône et, juste en face, la montagne du Vuache, tête de pont de la Haute-Savoie.